Mégalodon, le plus grand requin prédateur

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Publié le 12 février 2024Mis à jour le 15 mars 2025

Les mégalodons sont les plus grands requins prédateurs à avoir vécu sur Terre. Il y a plus de trois millions d'années, ils arpentaient tous les océans du globe. Les mégalodons pouvaient mesurer plus de deux fois la longueur d’un grand requin blanc adulte. Ils chassaient notamment des baleines, des dauphins et des phoques.

Un superprédateur ayant vécu il y a plus de 3,5 millions d’années

Illustration d'un mégalodon, requin géant aujourd'hui disparu, chassant une baleine du Néogène.

Reconstitution d’un mégalodon chassant une baleine du Néogène. Le mégalodon est le plus grand requin carnassier connu à avoir vécu sur Terre.

© Université de Zurich - J. J. Giraldo

Les mégalodons comptent parmi les plus grands superprédateurs que la Terre ait connu. Ils vivaient dans les océans il y a 3,5 à 20 millions d'années, lors du Néogène, soit plus de 40 millions d’années après la disparition des dinosaures non-aviens et des grands reptiles marins du Mésozoïque (comme les Mosasaures).

Les premières traces connues de mégalodons remontent au début du Néogène, il y a environ 20 millions d’années. Les traces les plus récentes datent d’il y a environ 3,6 millions d’années, la disparition des Mégalodons étant estimée à il y a environ 3,5 millions d’années1.

  • 1

    Boessenecker RW, Ehret DJ, Long DJ, Churchill M, Martin E, Boessenecker SJ. The Early Pliocene extinction of the mega-toothed shark Otodus megalodon - a view from the eastern North Pacific. ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6377595/

Carte localisant les fossiles de mégalodons. On en trouve sur les côtes de chaque continent.

Carte actuelle de la localisation des fossiles avérés de mégalodons (points bleus), d'après une étude parue en 2016 dans la revue Journal of Biology.

© Wiley Online Library

Un superprédateur des mers chaudes

Au Néogène, l’Isthme du Panama finit de se former. Le positionnement des continents est alors très semblable à ce qu’il est aujourd’hui. Les mégalodons vivent donc dans des mers et océans proches géographiquement de ceux que nous connaissons. Cependant, ces milieux sont plus chauds qu’aujourd’hui.

Les mégalodons chassent notamment des mammifères marins tels que les dauphins, les baleines, les phoques ou les lamantins. Des traces de morsures de mégalodons ont été retrouvées sur des fossiles de ces animaux.

Le nom scientifique de Mégalodon

Le nom mégalodon vient des mots grecs μέγας / mégas et ὀδούς / odoús qui signifient « grande dent ». 

En science, on nomme les êtres vivants avec un nom dit « scientifique », qui est composé d’un nom de genre puis d'un nom d’espèce : par exemple Tyrannosaurus rex ou Homo sapiens. Dans le cas du mégalodon, le genre auquel il appartient est encore débattu par les spécialistes. 

Pendant longtemps, il fut nommé Carcharodon megalodon, car on le pensait proche de Carcharodon carcharias, le grand requin blanc.

Aujourd’hui, les paléontologues l'appellent Otodus megalodon ou Carcharocles megalodon, selon qu’ils le considèrent proche des requins du genre Otodus ou du genre Carcharocles.

Le Néogène dans l'histoire de la vie

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Hadéen

Hadéen

Il y a 4,6 milliards d’années, la Terre achève sa formation. Débute alors la première ère géologique : l'Hadéen. Le noyau de notre planète se forme et la lune apparait, probablement à la suite d'un impact entre la Terre et une proto-planète nommée Théia.

La croûte terrestre commence sa formation, et la température à la surface de la planète baisse progressivement. Il y a 4 milliards d’années, à la fin de l'Hadéen, les conditions nécessaires à l'émergence de la vie sur Terre seront réunies.

Notre dossier sur l'Hadéen
Archéen

Archéen

Il y a 4 à 2,5 milliards d'années, la croûte terrestre continue de se former sous l’action d'un volcanisme intense. Plus tard, dans les océans très chauds, les premières bactéries et algues apparaissent. Leur photosynthèse produit alors du dioxygène, déchet toxique auquel le reste du vivant s'adaptera par la suite.

Certaines colonies de cyanobactéries sont organisées en tapis microbiens qui forment de grandes structure minérales appelées stromatolites. Ces structures sont les plus anciennes traces de vie connues.

Sur la frise : un stromatolite et une colonie d'algues, productrices d'oxygène.

Notre dossier sur l'Archéen
Protérozoïque

Protérozoïque

Au protérozoïque, du grec signifiant « avant l'animal », l'atmosphère se charge de l'oxygène produit dans les océans. A la suite d'un brusque refroidissement, les algues se diversifient sur les fonds marins et les animaux pluricellulaires apparaissent, tels que les méduses et des petits animaux munis de coquilles.

Sur la frise : un Dickinsonia (animal à corps mou) un Cloudinidae (animal à coquille) et une méduse.

Paléozoïque

L'ère Paléozoïque

Au paléozoïque, de nombreuses groupes d'espèces animales et végétales apparaissent et conquièrent tous les milieux. L’apparition d’animaux pourvus de squelettes minéralisés internes ou externes a facilité leur fossilisation et donc la préservation de spécimens jusqu’à nos jours.

Nos dossiers sur l'ère Paléozoïque
Cambrien

Cambrien

Au Cambrien, la formidable diversification de la vie démarrée au Protérozoïque se poursuit et s’accélère avec le développement de structures minéralisées, telles que les squelettes externes des arthropodes. Les fonds marins se peuplent d’animaux aux formes souvent très différentes des faunes actuelles. De nombreux groupes d’arthropodes, de vers, d’éponges ou de mollusques apparaissent.

Sur la frise : un Anomalocaris (arthropode) un trilobite (arthropode) et un Pirania (éponge tubulaire).

Notre dossier sur le Cambrien
Ordovicien
Extinction
Ordovicien-Silurien

Ordovicien

À l'Ordovicien, la vie animale se propage hors des fonds marins et gagne la colonne d'eau. Des vertébrés et des céphalopodes nagent en eaux libres alors que les brachiopodes et trilobites sont très fréquents sur les fonds marins. Les premières plantes terrestres colonisent les milieux humides continentaux. A la fin de l'Ordovicien, un refroidissement du climat entraîne la première des cinq grandes crises de la biodiversité.

Sur la frise : un Sacabambaspis (vertébré), un orthocône (céphalopode) et un brachiopode.

Extinction
Ordovicien-Silurien

La Terre connaît une première grande crise à la fin de l’Ordovicien, alors que la vie est exclusivement marine. Cette crise serait due à un intense épisode de glaciation et aurait provoqué la disparition de 60 à 70% des espèces.

Les cinq grandes crises du vivant
Silurien

Silurien

Au Silurien, les arthropodes et les vertébrés poursuivent leur diversification dans les océans. Dans les milieux humides continentaux, les plantes terrestres continuent de se diversifier avec l'apparition des plantes vasculaires (qui possèdent des tiges et de la sève). Elles sont accompagnées de certains arthropodes tels que les myriapodes et les arachnides.

Sur la frise : un euryptéride (ou scorpion de mer), un mille-pattes et l'une des premières plantes vasculaires, Cooksonia.

Dévonien
Extinction
du Dévonien

Dévonien

Au Dévonien, les vertébrés marins sont très diversifiés, en particulier par la présence de nombreux « poissons » cuirassés appelés placodermes. Les tétrapodes apparaissent, ce sont les premiers vertébrés munis de pattes et de doigts mais ils sont encore inféodés aux milieux aquatiques. La végétation du début du Dévonien ne mesure que quelques dizaines de centimètres de haut : elle fait peu à peu place à des forêts d'Archeopteris mesurant jusque 30 mètres.

Sur la frise : un placoderme (prédateur marin), un Calamophyton (arbre) et un Ichtyostega (tétrapode).

Extinction
du Dévonien

D’importantes variations climatiques et la chute de l’oxygénation des mers entraînent, à la fin du Dévonien, une crise qui provoque l'extinction du Dévonien et la disparition de 75% des espèces.

Les cinq grandes crises du vivant
Carbonifère

Carbonifère

Au Carbonifère, de riches écosystèmes forestiers se développent dans les zones humides. Les arbres et insectes volants se diversifient et se spécialisent, alors que débute l'essor des tétrapodes sur le milieu terrestre. C'est à cette période que, de la collision entre deux grands continents, nait le supercontinent de la Pangée.

Sur la frise : un paléodictyoptère (insecte volant), une fougère arborescente et un Hylonomus (reptile).

Notre dossier sur le Carbonifère
Permien
Extinction
Permien-Trias

Permien

À partir du Permien, à la suite suite d'une aridification du climat, la flore change considérablement. Les plantes à graines deviennent dominantes. Les nouvelles chaînes de montagnes subissent une forte érosion. Les amniotes (vertébrés à quatre pattes pondant des œufs) se diversifient sur la terre ferme. Dans les océans, le sommet de la chaîne alimentaire est dominé par des groupes proches des requins actuels.

Sur la frise : un dimétrodon (amniote), un rameau du conifère Walchia et un hélicoprion (proche des requins)

Extinction
Permien-Trias

A la fin du Permien a lieu la crise du Permien-Trias. C'est la plus grande qu’ait jamais connue la Terre. Elle provoque la disparition de plus de 90% des espèces, terrestres comme marines. Cette crise sans précédent aurait été essentiellement causée par deux épisodes volcaniques majeurs.

Les cinq grandes crises du vivant
Mésozoïque

L'ère Mésozoïque

Cette période de grande diversification de la biodiversité, comprise entre deux extinctions massives, dure près de 186 millions d’années. Elle se caractérise par l’émergence et la domination des dinosaures, des reptiles volants et des reptiles marins, ainsi que par l'apparition des mammifères et des plantes à fleurs.

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Trias
Extinction
Trias-Jurassique

Trias

Au Trias a lieu une forte diversification des reptiles : crocodiles, tortues ou encore dinosaures apparaissent sur le supercontinent de la Pangée, accompagnés des premiers mammifères. Des reptiles retournent à la vie marine. Les ptérosaures sont les nouveaux grands prédateurs volants. Les groupes dominants d’insectes sont les coléoptères, les diptères et les hyménoptères. Les conifères deviennent les arbres les plus abondants.

Sur la frise : un Morganucodon (mammifère), un ichthyosaure (reptile marin) et un ptérosaure (reptile volant).

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Extinction
Trias-Jurassique

La crise du Trias-Jurassique s'étend sur près de 17 millions d'années, un record en comparaison aux autres crises qui s’étendent sur des périodes durant de 1 à 2 millions d’années. 

Probablement induite par un intense épisode volcanique en plein cœur d'une Pangée fractionnée, cette crise conduit à la disparition de 70 à 80 % des espèces, alors que commence l'ouverture de l'océan Atlantique.

Les cinq grandes crises du vivant
Jurassique

Jurassique

Au Jurassique, la Pangée n'existe plus, morcelée par les océans Atlantique et Téthys où règnent les reptiles marins. Les dinosaures se diversifient, avec le développement du gigantisme mais aussi l'apparition des premiers oiseaux. Les insectes connaissent également une forte diversification. Côté forêts, les plantes à graines prospèrent mais les fougères restent très présentes dans certains milieux.

Sur la frise : un archéoptéryx (proche des futurs oiseaux), un crabe et un sauropode.

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Crétacé
Extinction
Crétacé-Paléogène

Crétacé

C'est au Crétacé qu'ont vécu de célèbres dinosaures comme le tyrannosaure ou le tricératops. Les ammonites et reptiles marins sont fréquents dans les océans tandis que les espèces d'oiseaux se diversifient. Les plantes à fleurs connaissent un très fort succès évolutif, événement majeur de la formation des écosystèmes à venir. Elles sont accompagnées de nombreux pollinisateurs.

Sur la frise : une ammonite, une abeille sur une fleur, un tyrannosaure.

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Extinction
Crétacé-Paléogène

La dernière grande crise du Crétacé-Paléogène est sans doute la plus connue, car elle correspond à l’extinction d’un des groupes d’animaux fossiles les plus célèbres, les dinosaures (à l'exception des oiseaux). Elle concorde avec un épisode volcanique majeur au Dekkan (Inde), auquel s’ajoute la chute d’un astéroïde dans la péninsule du Yucatan (Mexique). Ces deux événements ont impacté toute la planète.

Les cinq grandes crises du vivant

Cénozoïque

L'ère Cénozoïque

Débutant il y a 66 millions d’années, le Cénozoïque se poursuit aujourd'hui. Connu comme « l'ère des mammifères » du fait de la rapide évolution de ces derniers vers de grandes tailles, c'est aussi une période de grandes diversifications parmi les oiseaux, les plantes à fleurs ou encore les « poissons à arêtes ».

Paléogène

Paléogène

Le Paléogène se situe après la disparition des dinosaures non-aviens, des ammonites et de nombreux autres groupes d’espèces. Dans les milieux qu’ils laissent vacants, les mammifères et les oiseaux connaissent une forte diversification, alors que les actinoptérygiens (ou « poissons à nageoires rayonnées ») deviennent abondants dans les océans et en eaux douces. Les plantes à fleurs, notamment les arbres feuillus, poursuivent leur développement et deviennent la flore la plus diversifiée.

Sur la frise : un palmier, un baluchitère (grand mammifère) et un actinoptérygien.

Néogène

Néogène

Au Néogène, le courant de Drake se met en place autour de l’Antarctique et la planète se refroidit progressivement pour s’approcher du climat actuel. Durant le Néogène, l’isthme de Panama se referme et relie les Amériques du Nord et du Sud, formant une séparation entre Atlantique et Pacifique. Sur la terre ferme, les prairies de graminées deviennent fréquentes et la faune s’adapte à de nouveaux écosystèmes proches de ceux que l’on connait aujourd’hui.

Sur la frise : une graminée, une antilope (ruminant) et un Livyathan (odontocène ou « cétacé à dents »).

Quaternaire

Quaternaire

Le Quaternaire est la période géologique actuelle, commençant il y a 2,58 millions d'années. Plusieurs épisodes de glaciation et/ou l’émergence du genre humain amènent à l’extinction de la majorité des espèces de grands mammifères, tels que les paresseux géants ou les mammouths. Plus récemment, en un temps bien plus court que lors des autres périodes géologiques, les activités humaines impactent tous les écosystèmes et provoquent une augmentation globale de la température.

Sur la frise : un fuchsia, un humain et une méduse.

Les dents de mégalodons

Les mégalodons sont surtout connus par des fossiles de dents

Les fossiles de mégalodons les plus fréquents sont leurs dents. Elles sont aisément identifiables par leur taille et par leur structure :

  • Les dents de mégalodons sont les plus grandes dents connues de tous les requins. Elles peuvent mesurer plus de 15 centimètres de longueur. À titre de comparaison, celles du grand requin blanc ne dépassent pas les 5 centimètres.
  • Elles sont également reconnaissables à leur tranchant crénelé. Ces dents sont adaptées pour couper et arracher de larges morceaux de proies, généralement de trop grande taille pour être avalées entières.
Deux grandes dents posées dans des mains, les dents sont aussi longue que la main (peaume et doigts compris).

Deux dents de mégalodons de très grande taille.

© Mark Kostich - stock.adobe.com

Ces particularités permettent de reconnaître les traces de morsures des mégalodons sur les fossiles de leurs proies. 

En l’absence quasiment totale de fossiles du reste du corps du mégalodon, les illustrations les représentant sont fondées sur des travaux de recherche et sur l’apparence des autres espèces de requins proches ou ayant eu des modes de vie similaires, tels que le requin mako ou le grand requin blanc. 

Un échantillon de peau de mégalodon

En 2023, des denticules - sortes d'écailles recouvrant la peau des requins - ont été trouvés en ré-examinant une roche contenant des dents fossiles d'un mégalodon 2.

L'analyse de ces denticules a révélé qu'elles ne possèdent pas la structure hydrodynamique des peaux des requins les plus rapides. Chez ces requins, les denticules présentent des adaptations permettant de réduire énormément les forces de frottement sous l'eau. Cela permet de penser que les mégalodons se déplaçaient plutôt lentement, n’accélérant que brièvement pour capturer leurs proies.

  • 2

    Shimada, K., Yamaoka, Y., Kurihara, Y., Takakuwa, Y., Maisch, H. M., Becker, M. A., … Griffiths, M. L. (2023). Tessellated calcified cartilage and placoid scales of the Neogene megatooth shark, Otodus megalodon (Lamniformes: Otodontidae), offer new insights into its biology and the evolution of regional endothermy and gigantism in the otodontid clade. Historical Biology, 36(7), 1259–1273. doi.org/10.1080/08912963.2023.2211597

Colonne vertébrale et dents exposées dans un Muséum

La colonne vertébrale de Mégalodon, ici exposée à l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique, à Bruxelles, est presque complète : elle comporte 141 vertèbres fossilisées.

© IRSNB

Une colonne vertébrale de mégalodon trouvée en Belgique

Aucun fossile de squelette complet de mégalodon n’est connu à ce jour. Les collections de l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique (IRSNB), à Bruxelles, sont les seules à contenir une colonne vertébrale quasiment complète, découverte en 1926 à Anvers. 

Une autre colonne vertébrale de mégalodon, bien moins complète avec seulement 20 vertèbres associées, a été découverte en 1982 à Gram, au Danemark. Une de ces vertèbres est la plus grande vertèbre de mégalodon connue : elle mesure 23 centimètres de diamètre.

Pourquoi ne trouve-t-on pas de squelette complet de mégalodon ?

La rareté de ces fossiles, à l’exception des dents, est due à la composition du squelette des mégalodons. Les requins, comme les raies et les chimères, sont des chondrichtyens, ou « poissons cartilagineux ». Leur squelette est donc composé de cartilage (comme le pavillon des oreilles et le nez des humains) et non d’os.

Or, le cartilage est généralement très peu minéralisé : il comporte peu de minéraux tels que le calcium. À la mort d’un animal, ce sont principalement les parties minéralisées du corps qui ont une chance, bien que faible, de subsister et de devenir des fossiles. Les parties molles, et notamment le cartilage, se conservent beaucoup plus rarement. Par exemple, on ne retrouve généralement pas de traces du nez ou des oreilles sur les crânes humains vieux de seulement quelques années.

14 dents de mégalodons. Les dents sont de diverses couleurs, allant du noir au blanc, en passant par diverses nuances.

La Galerie de Paléontologie du Muséum national d’Histoire naturelle présente ces 14 dents de mégalodons de diverses teintes. Ces variations de couleurs dépendent des minéraux qui se sont incrustés lors du processus de fossilisation.

© MNHN

Les dents, au contraire, sont constituées de dentine et d’émail, plus solides et minéralisés que l’os. Elles ont donc davantage de chances de se fossiliser.

Les requins, dont font partie les mégalodons, renouvellent leurs dents tout au long de leur vie. Ils perdent ainsi régulièrement des dents, ce qui explique qu’elles se retrouvent en nombre dans tous les océans du monde.

Quelle taille mesurait Mégalodon ?

Depuis plus de 400 millions d’années, les requins peuplent les océans et les mers du globe. Le mégalodon est la plus grande espèce de requin prédateur connue des paléontologues. Certaines études estiment qu’il pourrait même être plus grand que le requin-baleine, un requin qui s’alimente par filtration, se nourrissant uniquement d’animaux de petite taille comme le zooplancton.

Pourquoi étudier la taille et le mode de vie des mégalodons ?

L’étude de la taille des mégalodons permet aux paléontologues d’évaluer l'impact de ces grands prédateurs sur leurs proies et leurs concurrents, mais aussi les conséquences de leur disparition sur la mise en place des écosystèmes marins plus récents. Plus largement, comprendre l’équilibre écologique de cette époque – et notamment l’extinction d’espèces comme les mégalodons – permet de mieux appréhender l’extinction des grands prédateurs marins actuels.

Comparaison de dents de Mégalodon et de grand requin blanc. Celle du mégalodon est au moins 2 fois plus longue et plus large.

Comparaison d’une dent de mégalodon (à gauche) avec une dent de grand requin blanc (à droite). Illustration didactique présentée en Galerie de Paléontologie.

© J.-L. Charnais

Jusque récemment, les estimations de taille des mégalodons étaient faites en comparant la taille de leurs dents à celles du grand requin blanc. Mais les paléontologues ne considèrent plus aujourd'hui le requin blanc comme un proche parent des mégalodons. Les études récentes sont donc complétées en s'élargissant à d’autres espèces de requins actuelles ou disparues.

Le rôle du mégalodon et du grand requin blanc dans les écosystèmes reste cependant similaire : il s’agit de grands prédateurs carnassiers présents dans tous les océans.

La taille moyenne et la taille maximale des mégalodons

La taille moyenne des mégalodons adultes et la taille totale des plus grands spécimens connus sont au cœur de nombreux débats. Toutefois, les études récentes s’accordent à dire que la taille moyenne des mégalodons adultes devait être d’au moins 10 mètres, et que les plus grands spécimens pouvaient dépasser les 15 mètres de long. Les débats tournent donc autour du fait qu’ils aient, ou non, pu être encore plus grands que cela.

Illustration de Megalodon et de grand requin blanc. Le mégalodon est au moins deux fois plus grand.

Comparaison d’un mégalodon et d’un grand requin blanc. Illustration présentée en Galerie de Paléontologie.

© J.-L. Charnais

Voici plusieurs exemples d’études récentes visant à estimer la taille de mégalodons ; toutes incluent d’autres espèces que le grand requin blanc dans leurs analyses :

  • En 2021, sur la base de la plus grande dent de mégalodon connue, des chercheurs de l’université de Floride estiment que l’individu aurait pu mesurer 20 mètres de long, avec une marge d’erreur estimée à ± 3,5 mètres. 3
  • En 2019 et 2021, deux études de l’université de Chicago évaluent que seules les dents de la mâchoire supérieure sont appropriées pour estimer la taille des espèces de requin éteintes. Leurs conclusions proposent une taille maximale des mégalodons d'environ 15 mètres. 4
  • En 2022 dans la revue Science, une équipe de recherche de l’université de Swansea, au Pays de Galles, publie une nouvelle étude basée sur la colonne vertébrale présente dans les collections de l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique. Ils effectuent la première proposition de reconstruction en 3D du corps de ce mégalodon et estiment la taille de l’individu à près de 16 mètres. 5
  • En 2023, des chercheurs de l’université de Californie répondent à l’étude de 2022, concluant que l’étude a sous-estimé la taille du spécimen de mégalodon, qui pourrait en fait largement dépasser les 20 mètres et avoir un physique plus allongé. 6
  • En mars 2025, une nouvelle étude de l'université de Chicago propose à nouveau que les mégalodons avaient une silhouette plus allongée. Les chercheurs estiment que le spécimen représenté par la colonne vertébrale danoise pourrait avoir mesuré jusque 24,3 mètres. L'étude propose également, sur la base des traces de croissance visibles sur les vertèbres, que la taille des mégalodons à la naissance serait de 3,5 à 4 mètres. 7
  • En 2015, deux chercheuses de l’université de Cambridge, montrent dans une étude que la taille de mégalodon a pu varier au cours du temps mais également selon le climat, et donc selon la latitude d'où proviennent les fossiles. Les tailles moyennes calculées dans cette étude, aussi considérées comme « tailles optimales », vont de 9,5 à 11 mètres de long. 8
  • 3

    Perez Victor J, Leder Ronny M & Badaut Teddy, 2021 — Body length estimation of Neogene macrophagous lamniform sharks (Carcharodon and Otodus) derived from associated fossil dentitions. Palaeontologia Electronica vol. 24, n° 1, p. 1-28. palaeo-electronica.org/content/current-in-press-articles/3284-estimating-lamniform-body-size

  • 4

    Kenshu Shimada Matthew F. Bonnan Martin A. Becker & Michael L. Griffiths, 2021 — Ontogenetic growth pattern of the extinct megatooth shark Otodus megalodon—implications for its reproductive biology, development, and life expectancy. Historical Biology vol. 33, n° 12, p. 3254-3259 dx.doi.org/10.1080/08912963.2020.1861608

  • 5

    Jack A. Cooper et al., 2022 — The extinct shark Otodus megalodon was a transoceanic superpredator, inferences from 3D modeling. Science Advances vol. 8, n° 33, eabm9424 dx.doi.org/10.1126/sciadv.abm9424

  • 6

    Sternes P, Jambura P, Türtscher Julia, Kriwet Jürgen, Siversson Mikael, Feichtinger Iris, Naylor G, Maisey J, Tomita Taketeru, Moyer J & others, 2024 — White shark comparison reveals a slender body for the extinct megatooth shark, Otodus megalodon. Palaeontologia Electronica, 27.1. a palaeo-electronica.org/content/2024/5079-megalodon-body-form

  • 7

    Shimada, Kenshu, Motani, Ryosuke, Wood, Jake J., Sternes, Phillip C., Tomita, Taketeru, Bazzi, Mohamad, Collareta, Alberto, Gayford, Joel H., Türtscher, Julia, Jambura, Patrick L., Kriwet, Jürgen, Vullo, Romain, Long, Douglas J., Summers, Adam P., Maisey, John G., Underwood, Charlie, Ward, David J., Maisch, Harry M. IV, Perez, Victor J., Feichtinger, Iris, Naylor, Gavin J.P., Moyer, Joshua K., Higham, Timothy E., da Silva, João Paulo C.B., Bornatowski, Hugo, González-Barba, Gerardo, Griffiths, Michael L., Becker, Martin A., and Siversson, Mikael. 2025. Reassessment of the possible size, form, weight, cruising speed, and growth parameters of the extinct megatooth shark, Otodus megalodon (Lamniformes: Otodontidae), and new evolutionary insights into its gigantism, life history strategies, ecology, and extinction. Palaeontologia Electronica, 28(1). https://doi.org/10.26879/1502
     

  • 8

    Pimiento C, Balk MA. Body-size trends of the extinct giant shark Carcharocles megalodon, a deep-time perspective on marine apex predators. Paleobiology. 2015;41(3). 479-490. DOI 10.1017/pab.2015.16

L’extinction des mégalodons

La disparition des mégalodons remonte à environ 3,5 millions d’années. Les fossiles de mégalodons deviennent plus rares à partir de la fin du Miocène, il y a plus de 5 millions d’années, puis disparaissent progressivement de certaines zones géographiques. Plus aucune trace fossile avérée scientifiquement ne date de moins de 3,6 millions d’années.9

Les rumeurs sur la survie de mégalodons de nos jours

Des rumeurs fantaisistes circulent sur Internet, indiquant que des mégalodons existeraient encore aujourd’hui. Elles sont notamment poussées par le bon état de conservation des dents trouvées sur les plages, et par l’image véhiculée par des films et autres œuvres de fiction. 

Il convient donc de préciser les choses suivantes :

  • Les réévaluations récentes de fossiles de dents de mégalodons datant de moins de 3,6 millions contredisent ces datations 10. Aucune trace fossile de mégalodon plus récente que 3,6 millions d’années n’est actuellement avérée, malgré les nombreuses recherches scientifiques sur le sujet. 
  • Les dents de mégalodons ne flottent pas : si elles sont aujourd’hui retrouvées sur des plages, ce n’est pas qu’elles ont été perdues par un animal au large et portées par les vagues, mais qu’elles se sont déposées lorsque ces terres étaient des fonds marins. Aujourd’hui, les dents affleurent simplement à la surface lorsque les plages s’érodent. Certaines dents peuvent être poussées par les courants, mais sur des distances relativement courtes.
  • Aucune trace de morsure pouvant correspondre aux dents de mégalodons n’est retrouvée sur des animaux marins datant de moins de 2 millions d’années. Un prédateur aussi massif a des besoins alimentaires estimés à 2 tonnes de viande par jour ; il aurait laissé des traces au cours de ces trois derniers millions d’années.
  • Les rumeurs de mégalodons survivant au plus profond des océans, dans les abysses, n’ont pas de fondement scientifique. Ces milieux demandent des adaptations extrêmes à la pression, aux basses températures et au manque de lumière. Les dents trouvées dans les abysses sont simplement tombées lors du renouvellement naturel des dents de mégalodons nageant en surface.
  • 9

    Boessenecker RW, Ehret DJ, Long DJ, Churchill M, Martin E, Boessenecker SJ. The Early Pliocene extinction of the mega-toothed shark Otodus megalodon - a view from the eastern North Pacific. www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6377595/

  • 10

    Boessenecker RW, Ehret DJ, Long DJ, Churchill M, Martin E, Boessenecker SJ. The Early Pliocene extinction of the mega-toothed shark Otodus megalodon - a view from the eastern North Pacific. ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6377595/

Les mégalodons ont-ils côtoyé les dinosaures ou les humains ?

Si certaines fictions montrent des mégalodons attaquant des dinosaures (notamment Tyrannosaurus rex), ou des humains actuels (Homo sapiens), cela reste de la pure fiction à but de divertissement.

Cependant, les mégalodons ont disparu il y a près de 3,5 millions d’années. À cette époque, les premiers australopithèques vivaient dans diverses régions d’Afrique. Ces proches parents des premiers humains ont émergé alors que les populations de mégalodons étaient sur le déclin. Les chances de rencontre entre des australopithèques et des mégalodons près des côtes africaines11 restent donc extrêmement faibles, d’autant plus que les australopithèques auraient vécu dans des savanes ou en forêt, à proximité de rivières plutôt qu’en bord de mer.

Concernant les dinosaures, seuls les dinosaures aviens ont survécu à la crise Crétacé-Paléogène, il y a 66 millions d’années. Si les mégalodons ont bien côtoyé des dinosaures, ce sont uniquement des oiseaux (et surtout des oiseaux marins), derniers représentants de ce groupe !

  • 11

    Pimiento C, Ehret DJ, MacFadden BJ, Hubbell G (2010) Ancient Nursery Area for the Extinct Giant Shark Megalodon from the Miocene of Panama. PLOS ONE 5(5): e10552. doi.org/10.1371/journal.pone.0010552

Les causes de l’extinction des mégalodons

Étant donnée leur taille, les mégalodons devaient chasser régulièrement de grandes proies pour subvenir à leurs besoins. Mais vers la fin du Néogène, au Pliocène, un refroidissement global et la baisse du niveau de la mer provoque la disparition de nombreux habitats côtiers. La mégafaune marine de l’époque est fortement impactée. Or cette mégafaune constitue une part importante des proies des mégalodons, notamment les baleines12.

  • 12

    Pimiento, C., Griffin, J.N., Clements, C.F. et al. The Pliocene marine megafauna extinction and its impact on functional diversity. Nat Ecol Evol 1, 1100–1106 (2017). doi.org/10.1038/s41559-017-0223-6

Un mégalodon chassant des baleines plus petites que lui

Représentation d'un mégalodon chassant des baleines du genre Eobalenoptera, parents éloignés du rorqual gris.

© K. Carr

A la même période, plusieurs groupes de grands prédateurs marins ont constitué une forte concurrence pour les mégalodons. Ces concurrents sont les cachalots, les orques (qui pratiquent la chasse en groupe) et le grand requin blanc récemment apparu.

Ces espèces étaient sans doute mieux adaptées à la chasse de proies plus petites et plus rapides que les baleines.

La combinaison de la raréfaction des proies et de l’augmentation de la concurrence sont les raisons retenues aujourd’hui pour expliquer le déclin des mégalodons, débutant il y a 5 millions d’années environ, jusqu’à leur disparition il y a 3,5 millions d’années.

Finalement, les mégalodons seraient les victimes indirectes du refroidissement survenu à la fin du Néogène, plus précisément lors du Pliocène. Les caractéristiques qui font des mégalodons des prédateurs exceptionnels dans l’histoire de la vie sont probablement celles qui ont causé leur extinction. Leur très grande taille et leur alimentation de superprédateurs très spécialisés, chassant surtout de grands mammifères marins, les ont rendu dépendants de ces proies et très sensibles à leur raréfaction.

Un requin géant partiellement « à sang chaud »

Une étude publiée dans la revue PNAS en 2022 indique que la température corporelle de Megalodon pouvait être supérieure de plus de 7°C à la température de son environnement 13.

Les mégalodons seraient ainsi en partie endothermes, ou “à sang chaud” : leur corps pouvait produire sa propre chaleur plutôt que d’avoir une température proche de celle de son environnement. Certains requins actuels, comme le requin mako ou le grand requin blanc, partagent ce trait.

L’endothermie induit un métabolisme élevé, qui aurait permis à Megalodon des pics de vitesse pour attraper ses proies, et un meilleur fonctionnement de son système digestif. Mais cela a un coût : le requin géant devait se nourrir davantage pour pouvoir produire cette énergie. Cette caractéristique a probablement contribué à son déclin lorsque les proies se sont faites plus rares, et les eaux plus froides. 

  • 13

    Michael L. Griffiths and Robert A. Eagle and Sora L. Kim and Randon J. Flores and Martin A. Becker and Harry M. Maisch and Robin B. Trayler and Rachel L. Chan and Jeremy McCormack and Alliya A. Akhtar and Aradhna K. Tripati and Kenshu Shimada, 2023 — Endothermic physiology of extinct megatooth sharks. Otodus megalodon was a gigantic shark that went extinct around 3.6 Mya. It could grow to the enormous size of at least 15 m… Proceedings of the National Academy of Sciences vol. 120, n° 27, e2218153120
    dx.doi.org/10.1073/pnas.2218153120

Remerciements à Alan Pradel, paléontologue spécialiste des requins, maître de conférence et chargé de collection au CR2P - UMR 7207 et Damien Germain, paléontologue, maître de conférence et chargé de collection au CR2P - UMR 7207.