L'Hadéen : dans le berceau de la Terre
L’Histoire de la Terre commence il y a environ 4,56 milliards d’années (Ga). Née de l’agglomération de poussières et de gaz qui se sont assemblés autour du jeune Soleil, notre planète se forme alors. Puis la Terre se transforme et devient une planète sur laquelle la vie s’installe.
Naissance du système solaire et ses planètes
À l’origine du système solaire, un nuage interstellaire qui s’est fragmenté et effondré sur lui-même. De ce nuage de gaz et de poussières sont nés le Soleil et des planètes différentes qui se sont organisées autour de cet astre massif.
Des embryons de planète
Il y a environ 4,6 milliards d’années (- 4 600 Ma), un gigantesque nuage interstellaire composé de gaz et de poussières se disloque en partie puis s’effondre sur lui-même en tournoyant. En son centre, une très forte pression et une très forte chaleur concentrent de l’énergie, jusqu’à former une étoile : notre Soleil.
Autour du Soleil, un disque de gaz se constitue alors, dans lequel des grains de poussière s’entrechoquent et s’agrègent entre eux. Ces agglomérations de matière et de gaz forment des petits corps qui deviennent des embryons de planètes, les protoplanètes.
Quelles sont les planètes du système solaire ?
La Terre, une planète tellurique
Au plus près du Soleil, les protoplanètes accumulent des roches, notamment des métaux , et donnent naissance aux planètes dites telluriques : Mercure, Venus, La Terre, Mars. Plus loin du Soleil se forment des planètes géantes composées essentiellement de gaz (hélium et hydrogène). Ce sont les géantes gazeuses, Jupiter et Saturne ainsi qu’Uranus et Neptune. Ces dernières conservent un cœur de roche et de glace.
Une origine commune, des destins divers
Toutes ces planètes ont mis quelque 100 millions d’années à se former. Et elles continueront ensuite à se transformer et à évoluer. Autour d’elles, d’autres corps célestes — grains de poussières, corps glacés, blocs de roche et de métal —, continuent de graviter autour du Soleil. Certains ont peu évolué et sont des vestiges des éléments originels du système solaire.
Comme les êtres vivants, les étoiles et les planètes naissent, évoluent, et partagent une histoire commune.
Patrick De Wever, géologue, professeur émérite au Muséum national d’Histoire naturelle.
Une origine infernale
À sa formation, la Terre est une boule de magma. Elle est percutée en permanence par des météorites. Ces chocs dégagent une énergie phénoménale. La température sur Terre devait alors dépasser les mille degrés. C’est pourquoi cette période originelle tire son nom du dieu grec Hadès, le maître des enfers.
Et la Terre prend forme
Durant 600 millions d’années, la Terre évolue dans des conditions de très haute température. Dans ce haut fourneau, les éléments se combinent pour modeler la planète.
Un noyau de fer
La jeune Terre est tellement chaude que tous les éléments qui la composent sont à l’état fondu dans un océan magmatique. Peu à peu, sous l’effet de la gravitation, les éléments les plus denses coulent et se rassemblent vers le centre. Ils forment un noyau métallique essentiellement composé de fer et de nickel. Autour du noyau, les éléments les moins denses restent sur place et forment le manteau. En surface, au contact des températures froides de l’espace, le magma refroidit et se solidifie en une croûte.
Pourquoi la Terre est-elle ronde ?
Du mouvement sous la croûte
Sous la croûte terrestre, les échanges de chaleur entre le noyau et l’extérieur créent des mouvements. Comme la soupe dans une casserole : au fond, les éléments chauffés perdent en densité et remontent vers la surface. Une fois en surface, ils refroidissent, redeviennent denses et replongent vers le fond. Les mouvements dus à ces échanges de chaleur et de matière ont lieu sur des zones de quelques kilomètres, appelées des cellules de convection. Ils vont façonner la Terre, notamment en distribuant les éléments chimiques entre la croûte et le manteau.
La Lune, élément stabilisateur
Dans le chaos du Système solaire naissant, il y a 4,524 milliards d’années (- 4 524 Ma), la Terre a été percutée par Théia, une petite planète de la taille de Mars (6 792 km de diamètre), soit presque deux fois plus petite que la Terre. Sous le choc, une partie de Théia s’est enfoncée dans la Terre. Des éclats, des débris arrachés aux deux planètes ont été éjectés dans l’espace. Piégés dans l’orbite terrestre, ils se sont regroupés et ont formé la Lune.
Celle-ci exerce depuis une influence déterminante sur notre planète. Sous l’effet de la gravitation, elle soulève deux fois par jour l’eau de l’océan, mais aussi la croûte terrestre. En France, à chacune de ces marées, le sol et nos maisons montent et descendent de 40 cm. La Lune stabilise aussi l’inclinaison de l’axe de la Terre. Or cette inclinaison est responsable des saisons. Enfin, la Lune influe également sur la vitesse de rotation de la Terre. Plus elle est proche, plus la Terre tourne vite. Ainsi il y a 400 millions d’années, l’année durait 400 jours. Aujourd’hui, la Lune continue de s’éloigner de la Terre : de 3,8 cm par an !
Les conditions de la vie
Dès 4 milliards d’années, les conditions propices à l’apparition des premières formes de vie se mettent en place : de l’énergie (solaire et terrestre) et de l’eau.
Sous la protection d’un champ magnétique terrestre
Le noyau métallique de la Terre est agité de mouvements de chaleur. Ces mouvements visqueux génèrent des courants électriques qui créent un champ magnétique.
Très tôt, la Terre aurait donc bénéficié de ce champ magnétique qui agit comme un bouclier protecteur contre le vent solaire. Ce dernier est fait de particules chargées électriquement (proton électrons) qui balaient les éléments légers de l’atmosphère terrestre. Sans champ magnétique, l’hydrogène, l’azote, l’eau seraient chassés dans l’espace.
À l’abri de l’atmosphère
L’atmosphère terrestre est faite de couches de gaz qui retiennent la chaleur et l’eau à la surface de la Terre. Une partie des rayons du Soleil est rejetée dans l’espace, tandis qu’une autre est réfléchie sur Terre par les gaz de l’atmosphère tels que le dioxyde de carbone (CO2) ou le méthane (CH4). Plus on compte de ces gaz dits "à effet de serre" dans l’atmosphère, plus la Terre se réchauffe.
À l’Hadéen, l’atmosphère terrestre ne contenait pas ou peu d’oxygène. Elle était en revanche composée d’une énorme quantité de dioxyde de carbone (CO2). Heureusement, le Soleil était bien plus froid qu’aujourd’hui. Aussi, le CO2 a maintenu une température terrestre proche de celle d’aujourd’hui.
Une Terre hydratée
L’eau est présente partout dans l’univers, à l’état de vapeur et de glace. Les poussières à l’origine des planètes du système solaire en contenaient. Les météorites qui bombardent les planètes telluriques apportent également de l’eau. Mais seule la Terre possède les bonnes conditions de pression et de température pour que l’eau reste liquide et coule à sa surface.
Ainsi, tandis que la Terre refroidissait lentement, les volcans recrachaient gaz et vapeur qui se condensaient en surface pour retomber en pluie et former les lacs et océans.
Qu’est-ce qu’une météorite ?
La vie sans oxygène
Malgré l’absence d’oxygène, il est possible que des organismes vivants soient apparus dans l’eau dès - 4 milliards d’années (- 4 000 Ma). Ils auraient converti la lumière et le CO2 en énergie et en nutriments.
De nos jours, des organismes vivent ainsi dans les profondeurs des océans sans oxygène, sans lumière et à des conditions de très forte pression. Ils se développent autour de sources chaudes dégageant du méthane, du CO2, de l’hydrogène et des métaux lourds et réussissent à puiser énergie et nourriture dans ces éléments.
Bombardement tardif : on efface tout et on recommence
Alors que la Terre prend forme, dans l’espace, les déplacements des planètes et autres corps célestes continuent de jouer une partie de billard cosmique. Entre - 4 et - 3,9 milliards d’années, les géantes gazeuses modifient leur orbite et renvoient une multitude de corps plus petits vers l’intérieur du système solaire.
Les planètes telluriques se retrouvent sous le feu d’un intense bombardement de météorites : le grand bombardement tardif. Si la vie avait commencé à s’installer, elle est probablement annihilée par ce regain d’activité qui fait à nouveau fondre la croûte terrestre. Pour que la vie se répande sur Terre, le processus devra redémarrer de zéro. À moins qu’une forme cachée dans une faille au fond de l’océan ait survécu pour réapparaître et se transformer plus tard…
L'Archéen, au commencement de la vie
Dossier rédigé en octobre 2023. Remerciements à Patrick de Wever, géologue, professeur émérite au Muséum national d’Histoire naturelle (UMR 7207, Centre de recherche en paléontologie).