Quelles sont les cinq grandes crises de la biodiversité ?

Nulle espèce n’est immortelle et l’histoire de la Terre est aussi rythmée par de nombreuses crises de la biodiversité parmi lesquelles on distingue cinq crises d'extinction de masse. Une histoire qui résonne avec le déclin actuel de la biodiversité.

Qu’est-ce qu’une crise de la biodiversité ?

Une crise implique une extinction de masse qui n’affecte pas seulement les espèces mais des familles entières. Elle doit se dérouler rapidement à l’échelle des temps géologiques (même un million d’années est une période relativement courte pour un géologue) et doit être ressentie à une échelle globale.

À notre échelle, les grandes crises de la biodiversité1 ne ressemblent pas au scénario apocalyptique d’un choc qui anéantirait instantanément toute forme de vie. Au contraire, elles se sont produites sur un temps long, à l’instar de la disparition des dinosaures dont le déclin s’est produit sur plus de 5 millions d’années. Et à chaque fois, des formes de vie ont subsisté.

Au cours des 500 derniers millions d’années, qui correspondent à l’essor de la biodiversité, la Terre a connu plusieurs extinctions dont la plus grande s’est produite il y a environ 250 millions d’années, au Permien-Trias.

  • 1Patrick DE WEVER, Bruno DAVID & Didier NERAUDEAU, Paléobiosphère, Vuibert, 2010, pp. 591-646 ; Patrick DE WEVER et Bruno DAVID, La biodiversité, de crise en crise, Albin Michel, 2015, p. 131-221.

Ammonite

© MNHN - J. Barbier

Plegiocidaris marginata (Goldfuss, 1826), oursin du gisement de Canjuers (Jurassique supérieur)

© MNHN - C. Lemzaouda
Spécimen de Cynthiacetus peruvianus

Spécimen de Cynthiacetus peruvianus exposé dans la Galerie de Paléontologie du Muséum national d’Histoire naturelle

© MNHN - A. Iatzoura

Cratère en Arizona formé par l’impact de la météorite Canyon Diablo qui s'est écrasée sur Terre il y a environ 49 000 ans (photo prise en 1984)

© M. Beauregard
Spécimen de Cynthiacetus peruvianus

Spécimen de Cynthiacetus peruvianus exposé dans la Galerie de Paléontologie du Muséum national d’Histoire naturelle

© MNHN - A. Iatzoura

Chronologie des cinq grandes crises du vivant

Ces échelles de temps demeurent des estimations, et d’autant plus à mesure que l’on remonte dans le temps.

Vers -450 millions d’années, Ère primaire (Paléozoïque)

La Terre connaît une première grande crise à la fin de l’Ordovicien-Silurien, lorsque la vie était exclusivement marine. Elle serait due à un intense épisode de glaciation et aurait provoqué la disparition de 60 à 70% des espèces.

Vers -358 millions d’années, Ère primaire (Paléozoïque)

L’extinction du Dévonien provoque la disparition de 75% des espèces, due à d’importantes variations climatiques et à la chute de l’oxygénation des mers.

Vers -252 millions d’années, À la limite entre l’ère primaire et secondaire (Paléozoïque-Mésozoïque)

La troisième crise du Permien-Trias est la plus grande qu’ait jamais connue la Terre. Elle provoque la disparition de plus de 90% des espèces, terrestres comme marines. Cette crise sans précédent aurait été essentiellement causée par deux épisodes volcaniques majeurs.

Vers -200 millions d’années, Ère secondaire (Mésozoïque)

La crise du Trias-Jurassique s’étend sur près de 17 millions d’années, un record en comparaison aux autres crises qui s’étendent entre 1 et 2 millions d’années. Elle conduit à la disparition de 70 à 80% des espèces à la suite du volcanisme atlantique.

Vers -66 millions d’années, Ère secondaire-tertiaire (Mésozoïque-Cénozoïque)

La dernière grande crise du Crétacé-Paléogène est sans doute la plus connue, car elle correspond à l’extinction d’un des groupes d’animaux fossiles les plus célèbres, les grands reptiles  (dont certains dinosaures). Elle concorde avec un épisode volcanique majeur, au Dekkan (Inde) auquel s’ajoute la chute d’un astéroïde dans la péninsule du Yucatan (Mexique) qui ont impacté toute la planète.

Les grandes extinctions peuvent se lire dans les couches sédimentaires lorsque que, sur certaines, n’apparait plus aucune trace de vie fossile. Cela ne signifie pas que la disparition a été brutale, au contraire, elle révèle un processus lent de diminution de l’abondance des espèces.

Il faut manier avec précaution les causes de ces extinctions, qui ne peuvent pas être imputables à un seul facteur et qui sont le résultat de combinaisons lentes et complexes de changements environnementaux.

Quand crise rime avec renaissance

Les grands épisodes d’extinction s’accompagnent d’un renouvellement des écosystèmes qui laisse le champ libre à l’épanouissement d’autres biodiversités. La dernière extinction du Crétacé-Tertiaire en est un bon exemple. Elle a vu subsister de nombreuses espèces, notamment certains insectes ou plantes à fleurs, et a permis aux petits mammifères survivants de se diversifier (sans lesquels nous ne serions pas là aujourd’hui).

Hardouinia potosiensis Lambert,1936 (holotype), oursin du Crétacé supérieur de Cardenas (Mexique)

© MNHN - C. Lemzaouda

Ammonite - Muséum national d’Histoire naturelle

© MNHN - L. Bessol

Jean-François Dejouannet, Archaeopteryx lithographica, 2014. Aquarelle et gouache (détail).

© MNHN - J.-F. Dejouannet UMS 2AD/GPAC

Sommes-nous en train de vivre une 6e extinction ?

Preuves d’une certaine résilience des écosystèmes, ces crises n’en sont pas moins significatives sur la fragilité du vivant. Elles nous amènent à considérer le grave déclin de la biodiversité observé depuis quelques décennies, dans lequel les activités humaines jouent un rôle central. Cette fois, une seule cause modifie les écosystèmes, une seule espèce : Homo sapiens.

Bibliographie

Bruno DAVID, À l’aube de la 6ème extinction, Grasset, 2021

Patrick DE WEVER et Bruno DAVID, La biodiversité, de crise en crise, Albin Michel, 2015

Patrick DE WEVER, Le Beau Livre de la Terre, Dunod, 2014

Patrick DE WEVER, Temps de la Terre, temps de l’Homme, Albin Michel, 2012

Patrick DE WEVER, Bruno DAVID & Didier NERAUDEAU, Paléobiosphère, Vuibert, 2010

The Parisianer, Chroniques du Muséum - Éditions du Muséum national d’Histoire naturelle, 2021

Article rédigé en avril 2022. Remerciements à Patrick De Wever, géologue, professeur émérite au Muséum national d'Histoire naturelle, pour sa relecture et sa contribution.

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