Les forêts luxuriantes du Carbonifère

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Publié le 15 février 2024

Le Carbonifère succède au Dévonien, il y a 359 millions d'années. Après l'apparition dès le Dévonien des premiers arbres et des forêts, le Carbonifère est le terrain d'une grande diversification des milieux tropicaux forestiers, notamment peuplés de nombreux insectes et amphibiens. C'est à cette période que les premiers amniotes – ancêtres des mammifères, oiseaux et reptiles – adoptent un mode de vie terrestre.

Les grandes masses continentales situées dans l'hémisphère Sud se rapprochent de celles situées en région tropicale et dans l'hémisphère nord

La collision entre les continents Gondwana et Laurasia entraîne la formation de nombreux massifs montagneux en zone équatoriale. Cette zone géographique correspond aux actuelles Amérique du Nord, Europe et Asie.

© paleobiodb.org

Le Carbonifère est marqué par le regroupement des masses continentales en un nouveau supercontinent : la Pangée.

Il est le résultat de la collision de plusieurs blocs dont le Gondwana au sud et ce qui sera la Laurasia au nord. Cette collision entraine la formation d’une immense chaîne de montagnes, la chaîne hercynienne, ou chaîne varisque, traversant la Pangée d’est en ouest. La formation d’une chaîne de montagnes est appelée une orogénèse.

On retrouve aujourd’hui les racines de cette chaîne de montagnes dans l’Oural, les Ardennes, le Massif central, les Vosges, le Massif armoricain, ainsi que le Hartz en Allemagne. La chaîne de montagnes des Appalaches, à l'est de l’actuelle Amérique du Nord, voit également le jour à cette période.

Le nord de la Pangée, incluant ces massifs, se trouve alors au niveau des tropiques, où le climat est propice au développement de milieux humides foisonnant de vie.

Les milieux humides au Carbonifère

Aujourd’hui 40 % des espèces végétales et animales continentales sont directement dépendantes des zones humides pour vivre ou se reproduire mais au début du Carbonifère, c’est la quasi-totalité des espèces qui étaient entièrement dépendantes de ces milieux, appelés marais carbonifères.

Ces environnements chauds et humides, situés en zone tropicale, sont très favorables à la végétation. Des forêts pluviales très diversifiées se développent dans les milieux suivants1 :

  • bords de mer et deltas, où les zones humides bénéficient de l’influence de la mer et d’espèces marines ;
  • berges de rivières et de fleuves ainsi que  leurs environs et leurs anciens lits ;
  • vallées de lacs situés en montagne et autour de ces reliefs nouvellement formés.
  • 1Jean Galtier, 2005, La végétation des bassins houilliers au Carbonifère, La Garance Voyageuse n°71, p. 24-29.
Paysage présentant des insectes volants et une flore très différente d'aujourd'hui

La faune et la flore du bassin de Montceau-les-Mines, dans le massif central, reconstituées dans l’expérience en réalité virtuelle Mondes Disparus.

© MNHN - Excurio

La France au Carbonifère se situe à l’équateur. Le climat y est tropical humide. De grandes forêts marécageuses vont se développer et accueillir une faune très diversifiée. 

Le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais se situe en bord de mer au Carbonifère. La Lorraine est alors une grande plaine située au pied d’un massif montagneux. Dans le Massif central, de grandes zones humides se développent autour de lacs de montagne comme dans le bassin de Montceau-les-Mines.

Dessin de chimère fossile

Iniopera est une chimère du Carbonifère qui attrapait ses proies par succion.

© MNHN - S. Fernandez

La vie dans les océans du Carbonifère

Une partie importante de l’histoire de la vie, se déroule, au Carbonifère, dans ces zones humides continentales. Mais la diversification de la vie se poursuit bien sûr également en milieu océanique et marin. Suite à la disparition des superprédateurs du Dévonien – les placodermesun véritable essor a lieu chez les chondrichtyens (requins, raies et chimères) et les actinoptérygiens (ou « poissons à nageoire rayonnée ») ; cela malgré la présence d’autres prédateurs tels que les ammonoïdes (parents lointains des ammonites).

Le Carbonifère dans l'histoire de la vie

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Hadéen

Hadéen

Il y a 4,6 milliards d’années, la Terre achève sa formation. Débute alors la première ère géologique : l'Hadéen. Le noyau de notre planète se forme et la lune apparait, probablement à la suite d'un impact entre la Terre et une proto-planète nommée Théia.

La croûte terrestre commence sa formation, et la température à la surface de la planète baisse progressivement. Il y a 4 milliards d’années, à la fin de l'Hadéen, les conditions nécessaires à l'émergence de la vie sur Terre seront réunies.

Notre dossier sur l'Hadéen
Archéen

Archéen

Il y a 4 à 2,5 milliards d'années, la croûte terrestre continue de se former sous l’action d'un volcanisme intense. Plus tard, dans les océans très chauds, les premières bactéries et algues apparaissent. Leur photosynthèse produit alors du dioxygène, déchet toxique auquel le reste du vivant s'adaptera par la suite.

Certaines colonies de cyanobactéries sont organisées en tapis microbiens qui forment de grandes structure minérales appelées stromatolites. Ces structures sont les plus anciennes traces de vie connues.

Sur la frise : un stromatolite et une colonie d'algues, productrices d'oxygène.

Notre dossier sur l'Archéen
Protérozoïque

Protérozoïque

Au protérozoïque, du grec signifiant « avant l'animal », l'atmosphère se charge de l'oxygène produit dans les océans. A la suite d'un brusque refroidissement, les algues se diversifient sur les fonds marins et les animaux pluricellulaires apparaissent, tels que les méduses et des petits animaux munis de coquilles.

Sur la frise : un Dickinsonia (animal à corps mou) un Cloudinidae (animal à coquille) et une méduse.

Paléozoïque

L'ère Paléozoïque

Au paléozoïque, de nombreuses groupes d'espèces animales et végétales apparaissent et conquièrent tous les milieux. L’apparition d’animaux pourvus de squelettes minéralisés internes ou externes a facilité leur fossilisation et donc la préservation de spécimens jusqu’à nos jours.

Nos dossiers sur l'ère Paléozoïque
Cambrien

Cambrien

Au Cambrien, la formidable diversification de la vie démarrée au Protérozoïque se poursuit et s’accélère avec le développement de structures minéralisées, telles que les squelettes externes des arthropodes. Les fonds marins se peuplent d’animaux aux formes souvent très différentes des faunes actuelles. De nombreux groupes d’arthropodes, de vers, d’éponges ou de mollusques apparaissent.

Sur la frise : un Anomalocaris (arthropode) un trilobite (arthropode) et un Pirania (éponge tubulaire).

Notre dossier sur le Cambrien
Ordovicien
Extinction
Ordovicien-Silurien

Ordovicien

À l'Ordovicien, la vie animale se propage hors des fonds marins et gagne la colonne d'eau. Des vertébrés et des céphalopodes nagent en eaux libres alors que les brachiopodes et trilobites sont très fréquents sur les fonds marins. Les premières plantes terrestres colonisent les milieux humides continentaux. A la fin de l'Ordovicien, un refroidissement du climat entraîne la première des cinq grandes crises de la biodiversité.

Sur la frise : un Sacabambaspis (vertébré), un orthocône (céphalopode) et un brachiopode.

Extinction
Ordovicien-Silurien

La Terre connaît une première grande crise à la fin de l’Ordovicien, alors que la vie est exclusivement marine. Cette crise serait due à un intense épisode de glaciation et aurait provoqué la disparition de 60 à 70% des espèces.

Les cinq grandes crises du vivant
Silurien

Silurien

Au Silurien, les arthropodes et les vertébrés poursuivent leur diversification dans les océans. Dans les milieux humides continentaux, les plantes terrestres continuent de se diversifier avec l'apparition des plantes vasculaires (qui possèdent des tiges et de la sève). Elles sont accompagnées de certains arthropodes tels que les myriapodes et les arachnides.

Sur la frise : un euryptéride (ou scorpion de mer), un mille-pattes et l'une des premières plantes vasculaires, Cooksonia.

Dévonien
Extinction
du Dévonien

Dévonien

Au Dévonien, les vertébrés marins sont très diversifiés, en particulier par la présence de nombreux « poissons » cuirassés appelés placodermes. Les tétrapodes apparaissent, ce sont les premiers vertébrés munis de pattes et de doigts mais ils sont encore inféodés aux milieux aquatiques. La végétation du début du Dévonien ne mesure que quelques dizaines de centimètres de haut : elle fait peu à peu place à des forêts d'Archeopteris mesurant jusque 30 mètres.

Sur la frise : un placoderme (prédateur marin), un Calamophyton (arbre) et un Ichtyostega (tétrapode).

Extinction
du Dévonien

D’importantes variations climatiques et la chute de l’oxygénation des mers entraînent, à la fin du Dévonien, une crise qui provoque l'extinction du Dévonien et la disparition de 75% des espèces.

Les cinq grandes crises du vivant
Carbonifère

Carbonifère

Au Carbonifère, de riches écosystèmes forestiers se développent dans les zones humides. Les arbres et insectes volants se diversifient et se spécialisent, alors que débute l'essor des tétrapodes sur le milieu terrestre. C'est à cette période que, de la collision entre deux grands continents, nait le supercontinent de la Pangée.

Sur la frise : un paléodictyoptère (insecte volant), une fougère arborescente et un Hylonomus (reptile).

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Permien
Extinction
Permien-Trias

Permien

À partir du Permien, à la suite suite d'une aridification du climat, la flore change considérablement. Les plantes à graines deviennent dominantes. Les nouvelles chaînes de montagnes subissent une forte érosion. Les amniotes (vertébrés à quatre pattes pondant des œufs) se diversifient sur la terre ferme. Dans les océans, le sommet de la chaîne alimentaire est dominé par des groupes proches des requins actuels.

Sur la frise : un dimétrodon (amniote), un rameau du conifère Walchia et un hélicoprion (proche des requins)

Extinction
Permien-Trias

A la fin du Permien a lieu la crise du Permien-Trias. C'est la plus grande qu’ait jamais connue la Terre. Elle provoque la disparition de plus de 90% des espèces, terrestres comme marines. Cette crise sans précédent aurait été essentiellement causée par deux épisodes volcaniques majeurs.

Les cinq grandes crises du vivant
Mésozoïque

L'ère Mésozoïque

Cette période de grande diversification de la biodiversité, comprise entre deux extinctions massives, dure près de 186 millions d’années. Elle se caractérise par l’émergence et la domination des dinosaures, des reptiles volants et des reptiles marins, ainsi que par l'apparition des mammifères et des plantes à fleurs.

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Trias
Extinction
Trias-Jurassique

Trias

Au Trias a lieu une forte diversification des reptiles : crocodiles, tortues ou encore dinosaures apparaissent sur le supercontinent de la Pangée, accompagnés des premiers mammifères. Des reptiles retournent à la vie marine. Les ptérosaures sont les nouveaux grands prédateurs volants. Les groupes dominants d’insectes sont les coléoptères, les diptères et les hyménoptères. Les conifères deviennent les arbres les plus abondants.

Sur la frise : un Morganucodon (mammifère), un ichthyosaure (reptile marin) et un ptérosaure (reptile volant).

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Extinction
Trias-Jurassique

La crise du Trias-Jurassique s'étend sur près de 17 millions d'années, un record en comparaison aux autres crises qui s’étendent sur des périodes durant de 1 à 2 millions d’années. 

Probablement induite par un intense épisode volcanique en plein cœur d'une Pangée fractionnée, cette crise conduit à la disparition de 70 à 80 % des espèces, alors que commence l'ouverture de l'océan Atlantique.

Les cinq grandes crises du vivant
Jurassique

Jurassique

Au Jurassique, la Pangée n'existe plus, morcelée par les océans Atlantique et Téthys où règnent les reptiles marins. Les dinosaures se diversifient, avec le développement du gigantisme mais aussi l'apparition des premiers oiseaux. Les insectes connaissent également une forte diversification. Côté forêts, les plantes à graines prospèrent mais les fougères restent très présentes dans certains milieux.

Sur la frise : un archéoptéryx (proche des futurs oiseaux), un crabe et un sauropode.

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Crétacé
Extinction
Crétacé-Paléogène

Crétacé

C'est au Crétacé qu'ont vécu de célèbres dinosaures comme le tyrannosaure ou le tricératops. Les ammonites et reptiles marins sont fréquents dans les océans tandis que les espèces d'oiseaux se diversifient. Les plantes à fleurs connaissent un très fort succès évolutif, événement majeur de la formation des écosystèmes à venir. Elles sont accompagnées de nombreux pollinisateurs.

Sur la frise : une ammonite, une abeille sur une fleur, un tyrannosaure.

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Extinction
Crétacé-Paléogène

La dernière grande crise du Crétacé-Paléogène est sans doute la plus connue, car elle correspond à l’extinction d’un des groupes d’animaux fossiles les plus célèbres, les dinosaures (à l'exception des oiseaux). Elle concorde avec un épisode volcanique majeur au Dekkan (Inde), auquel s’ajoute la chute d’un astéroïde dans la péninsule du Yucatan (Mexique). Ces deux événements ont impacté toute la planète.

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Cénozoïque

L'ère Cénozoïque

Débutant il y a 66 millions d’années, le Cénozoïque se poursuit aujourd'hui. Connu comme « l'ère des mammifères » du fait de la rapide évolution de ces derniers vers de grandes tailles, c'est aussi une période de grandes diversifications parmi les oiseaux, les plantes à fleurs ou encore les « poissons à arêtes ».

Paléogène

Paléogène

Le Paléogène se situe après la disparition des dinosaures non-aviens, des ammonites et de nombreux autres groupes d’espèces. Dans les milieux qu’ils laissent vacants, les mammifères et les oiseaux connaissent une forte diversification, alors que les actinoptérygiens (ou « poissons à nageoires rayonnées ») deviennent abondants dans les océans et en eaux douces. Les plantes à fleurs, notamment les arbres feuillus, poursuivent leur développement et deviennent la flore la plus diversifiée.

Sur la frise : un palmier, un baluchitère (grand mammifère) et un actinoptérygien.

Néogène

Néogène

Au Néogène, le courant de Drake se met en place autour de l’Antarctique et la planète se refroidit progressivement pour s’approcher du climat actuel. Durant le Néogène, l’isthme de Panama se referme et relie les Amériques du Nord et du Sud, formant une séparation entre Atlantique et Pacifique. Sur la terre ferme, les prairies de graminées deviennent fréquentes et la faune s’adapte à de nouveaux écosystèmes proches de ceux que l’on connait aujourd’hui.

Sur la frise : une graminée, une antilope (ruminant) et un Livyathan (odontocène ou « cétacé à dents »).

Quaternaire

Quaternaire

Le Quaternaire est la période géologique actuelle, commençant il y a 2,58 millions d'années. Plusieurs épisodes de glaciation et/ou l’émergence du genre humain amènent à l’extinction de la majorité des espèces de grands mammifères, tels que les paresseux géants ou les mammouths. Plus récemment, en un temps bien plus court que lors des autres périodes géologiques, les activités humaines impactent tous les écosystèmes et provoquent une augmentation globale de la température.

Sur la frise : un fuchsia, un humain et une méduse.

L'exploitation minière du charbon du Carbonifère

Sous les bâtiments des mines, un ascenseur permet de rejoindre plusieurs filons horizontaux situés à des profondeurs différentes

Représentation d'une mine de charbon, permettant d'accéder à plusieurs gisements fossiles. Ces gisements sont les restes sédimentaires d'anciennes forêts du Carbonifère. Les différentes couches de charbon sont séparées par des dépôts d'origine non végétale.

CC0 Georges Colomb

Au cours des soixante millions d’années que dure le Carbonifère, les forêts connaissent de nombreux cycles de développement et de recul liés à des épisodes réguliers de subsidence (affaissement) qui entraînent la montée des eaux. Les forêts marécageuses vont ainsi disparaitre périodiquement et laisser derrière elles des sols très riches en matière organique, qui donneront dans certains cas du charbon.

En effet, en cas d'enfouissement rapide et en absence de micro-organismes capables de dégrader cette importante quantité de matière organique, celle-ci va se transformer en roche sédimentaire dite « carbonée », appelée charbon (ou charbon minéral).

Ainsi vont être formées les importantes réserves de charbon (aussi appelé houille) d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie. L'exploitation minière du charbon permet l’essor économique et industriel de ces régions dès le début du XIXe siècle. Les connaissances en géologie facilitent la découverte de nouveaux gisements de charbon, alors que l’activité minière intense met au jour de nombreux fossiles datant du Carbonifère, permettant une très bonne connaissance de la faune et de la flore de cette époque.

Une flore unique

Grâce à l'étude des fossiles végétaux, nous savons que les premières forêts prospéraient déjà à la fin du Dévonien. C’est à cette période, précédant le Carbonifère, que sont apparus les premières feuilles, les systèmes racinaires, la reproduction grâce aux ovules ainsi que les premiers arbres. C’est à partir de cet héritage que les forêts du Carbonifère se développent et se diversifient.

Les forêts du Carbonifère sont très différentes de celles que nous connaissons aujourd’hui. La majorité des arbres se reproduisent au moyen de spores, comme les fougères actuelles, et prospèrent préférentiellement dans des milieux humides. D'autres plantes se reproduisent au moyen d’ovules et de grains de pollen, un type de reproduction qui leur permet de pousser en périphérie des environnements les plus humides. Les plantes à graines existent déjà, notamment des conifères, mais sont très minoritaires jusqu'à la fin du Carbonifère. Les plantes à fleurs (ou angiospermes), quant à elles, se diversifieront plus de 150 millions d’années plus tard, au début du Crétacé.

Les forêts du Carbonifère sont dominées par les lycophytes, dont les représentants actuels sont de petite taille alors qu'au Carbonifère il s'agissait de grands arbres tels que les lépidodendrons et les sigillaires. Ces arbres avaient une croissance très rapide, en à peine 10 ans ils pouvaient atteindre 20 à 40 mètres.

Des plantes plus basses sont également fréquentes dans ces forêts : des fougères dont les formes arborescentes du genre Psaronius ; les Calamites, ancêtres des prêles actuelles ; les Cordaites, proches des conifères ; et les Medullosa, proches des cycas actuels.

Voici quelques exemples d’arbres qui peuplent ces forêts il y a plus de 300 millions d’années :

La partie foliaire des psaronius ressemble aux fougères actuelles, notamment aux fougères arborescentes telles que Dicksonia antarctica. Des racines partent de son faux-tronc en direction du sol.

Les Psaronius sont des fougères arborescentes, pouvant mesurer plus de cinq mètres de haut. Ce sont des Filicophytes, groupe auquel appartiennent les fougères actuelles. Elles possèdent un faux-tronc appelé « stipe » qui n’est pas constitué de bois. De nombreuses racines adventives descendent le long de ce stipe.

© Excurio - Guillaume Duflos
Les coupe de fossiles de troncs de Psaronius présentent de nombreux tâches sur la moitié externe

Le nom Psaronius, qui en plus de désigner la plante entière, désigne également le stipe (ou « faux-tronc ») fossilisé vient du grec signifiant « étourneau », en référence aux motifs de celui-ci, ressemblant au plumage de ces oiseaux. Les fossiles de feuilles de Psaronius ont été nommés Pecopteris.  

© MNHN
Les calamites présentent des aspects très différents en fonction de leur âge. L’arbre plus âgé ressemble à un conifère, alors que plus jeune il pouvait avoir l’aspect d’un bambou ou encore d’un petit buisson.

Les calamites sont un groupe d’arbres aujourd’hui disparu, proches des prêles actuelles. Leurs branches et feuilles s’organisent en groupes sur des étages successifs appelés verticilles. Les tiges se poursuivent au niveau du sol formant de très gros rhizomes. Ils peuvent mesurer jusqu'à 10 mètres et sont très fréquents dans les marais du Carbonifère, au milieu d’arbres de plusieurs fois leur taille  .

© Excurio - Guillaume Duflos
Les lépidodendrons sont de grands arbres du Carbonifère possédant des feuilles uniquement à leur sommet

Les lépidodendrons sont des lycophytes, un groupe de plantes vasculaires représentées aujourd’hui uniquement par des espèces de petites taille se développant principalement dans des milieux humides. Au Carbonifère, ils peuvent mesurer jusque 40 mètres de haut. Ils bénéficient d’un ancrage au sol très important grâce à un système d’axes souterrains très développés appelés Stigmaria.

© Excurio - Guillaume Duflos
Les fossiles de troncs de Lepidodendrons présentent des cicatrices de forme losange.

Fossile de tronc de lépidodendron. Ces arbres perdent leurs feuilles dans la partie basale au fur et à mesure de leur croissance. La chute de celles-ci  laisse sur leurs troncs des cicatrices en forme de losange,  caractéristique des lépidodendrons.

© MNHN
Les sigillaires sont des arbres très en hauteur, apparus au Dévonien, avant le Carbonifère. Ils portaient de longues feuilles très fines à leur sommet ainsi que des grappes d’ovules ressemblant à des cônes de conifères.

Les sigillaires, du genre Sigillaria, font partie du groupe des lycophytes tout comme les lépidodendrons et peuvent mesurer jusque trente mètres de hauteur. Ce sont des arbres qui se ramifient très tard et peu de fois (1 à 2 fois), ce qui leur donne une allure caractéristique assez étrange. Sur leurs troncs, on peut noter la présence comme chez les lépidodendrons de cicatrices, qui sont cette fois de forme ronde ou hexagonale.  

© Excurio - Guillaume Duflos
Les cordaïtes : de grands arbres avec des feuilles en longueur distribuées en épis. Une forme arbustive de la même plante existe également.

Les Cordaites constituent un groupe d’arbres aujourd'hui éteint, proche de celui des conifères. Leurs feuilles sont très longues, de plusieurs dizaines de centimètres de long jusqu’à 1 mètre, pour quelques centimètres de large. La morphologie des Cordaites varie en fonction du milieu : les formes arbustives les plus petites sont en général retrouvées en milieu marécageux, les formes plus grandes en milieu plus sec.

© Excurio - Guillaume Duflos
Les feuilles des sphenophyllums sont regroupées par 6 autour de la tige, il ne s’agit pas d’arbres mais de petites plantes poussant au raz sol.

Le genre Sphenophyllum est proche des calamites mais comprend néanmoins uniquement des petites plantes rampantes. Elles se développent en couvre-sol ou en s’appuyant sur les troncs des arbres des forêts du Carbonifère.

© Excurio - Guillaume Duflos
Sur les fossiles de Sphenophyllum, les feuilles sont groupées par 5 sur un même noeud de la tige

Ce spécimen, découvert par Adolphe Brongniart en 1825, à Saarbrücke, montre les feuilles d’un Sphenophyllum emarginatum. Ses feuilles sont regroupées en verticilles, c’est-à-dire que plus de deux feuilles, six en l’occurrence, poussent sur un même nœud de la tige.

© MNHN
Les walchias sont de grands conifères au feuillage dense et possédant de petites feuilles en forme de griffe de chat, comme les feuilles des araucarias actuels

Les Walchia sont un groupe éteint de conifères. Ils ne portent pas d‘aiguilles mais de petites feuilles en forme de griffe de chat, comme certains araucarias actuels. Ils font partie des premiers conifères, apparus à la fin du Carbonifère.

© Excurio - Guillaume Duflos

Des forêts peuplées de blattes et de criquets

Les forêts pluviales sont très propices à la diversification des espèces animales. Au début du Carbonifère, peu d'amphibiens, et aucun reptile ou mammifère ne peuplent ces forêts. Cela permet notamment aux insectes de s'y développer.

Femelle de Ctenoptilus frequens insérant des œufs dans le sol de la forêt à l’aide de son ovipositeur allongé

Ctenoptilus frequens est un insecte omnivore du Carbonifère. Il est proche des orthoptères actuels (criquets, grillons et sauterelles).

© X. Zuo & eLife

Les faunes d’insectes et d’autres arthropodes du Carbonifère sont principalement connues par des fossiles datant de -325 à -299 millions d’années, soit la seconde moitié de cette période, appelée le Carbonifère supérieur. La première moitié a fourni très peu de fossiles d’insectes : c’est ce qu’on appelle la lacune des hexapodes.

On sait cependant que cette période a été très importante pour l’évolution des insectes. En effet, la très grande diversité de fossiles d’insectes de la fin du Carbonifère renseigne les paléontologues sur ce qui s’est passé sur l’ensemble de cette période géologique.

Fossile d'un insecte ayant une petite tête, deux paires d'ailes et un long abdomen triangulaire

Les insectes du genre Woodwardia possédaient une petite tête et un long abdomen triangulaire terminé par des filaments, ou cerques. Ce spécimen de Woodwardia nigra a une envergure d’environ 16 cm.

© MNHN

La première grande diversification des insectes

À une période encore mal connue, la classe des insectes, le groupe d’animaux de loin le plus diversifié aujourd’hui, se différencie de certains crustacés marins et se développe sur la terre ferme. Plus tard, la fin du Dévonien et le début du Carbonifère ont probablement été la période de la plus importante diversification des insectes. Outre l’apparition du vol – ou plus précisément, des différents types de vol – cet intervalle a vu apparaître l’ensemble des lignées majeures d’insectes connues aujourd’hui.

Les insectes fossiles les mieux connus sont ceux munis d'ailes, les ptérygotes. Dès le Pennsylvanien, il y a 323 millions d'années, ils ont adopté des modes d’alimentation variés, allant du régime détritivore au régime carnivore, en passant par celui des insectes piqueurs-suceurs de sève. Or, ce dernier régime alimentaire nécessite des adaptations particulières, car la sève est pauvre en certains nutriments. Cette complexité suggère une origine des ptérygotes remontant au moins au début du Carbonifère.

Fossile de Stenodictyia fayoli, montrant une troisième aile, plus courte, située derrière la tête sur le prothorax

Sur les fossiles du genre Stenodictyia, 3 paires d’ailes peuvent être observées. La plus petite est située plus à l’avant du corps, au niveau du prothorax.

© MNHN - O. Béthoux

La diversité des insectes peut aussi être étudiée à partir de la variété de leurs ailes et des fonctions de celles-ci. En effet, au Carbonifère supérieur, plusieurs types de vol existent déjà (allant du vol plané au vol stationnaire)2. On trouve aussi de surprenants insectes dotés de 3 paires d’ailes, d’autres ayant des ailes aux formes inconnues actuellement. Certains ptérygotes avaient des ailes à coloration disruptive, permettant de se fondre dans le sous-bois où ils volaient.

Signe encore plus marquant de l’ancienneté de l’apparition des ailes, celles de certains insectes ont déjà acquis un rôle secondaire, comme par exemple chez les blattoïdes dont les ailes antérieures sont devenues des élytres protecteurs.

On pense aussi que l’émission de sons, obtenue en frottant les ailes entre elles ou sur une partie du corps, était déjà apparue3. L’acquisition de telles adaptations prend des millions, voir des dizaines de millions d’années, et a pu se faire progressivement tout au long du Carbonifère.

  • 2Wootton RJ, Kukalová-Peck J. Flight adaptations in Palaeozoic Palaeoptera (Insecta). Biol Rev Camb Philos Soc. 2000.
  • 3Song, H., Béthoux, O., Shin, S. et al. Phylogenomic analysis sheds light on the evolutionary pathways towards acoustic communication in Orthoptera. Nat Commun 11, 4939 (2020).

Les groupes d’insectes et arthropodes les plus diversifiés sur la terre ferme au Carbonifère

À notre époque, les insectes sont principalement représentés par les coléoptères (scarabées, coccinelles...), les diptères (mouches, syrphes...), les hyménoptères (abeilles, guêpes...) et les lépidoptères (papillons). Mais au Carbonifère, trois autres groupes d’insectes étaient les plus représentés :

    Blatte de Madagascar

    Le groupe souche des dictyoptères, lointains parents des blattes, des termites et des mantes religieuses actuelles, étaient les insectes les plus fréquents au Carbonifère, mais étaient représentés par peu d’espèces différentes.

    © Виталий Сова - stock.adobe.com
    Criquet

    Le groupe souche des orthoptères, lointains parents des criquets et sauterelles actuels, était également présent. Généralement moins abondants que les dictyoptères, ils étaient cependant beaucoup plus diversifiés.

    © patrick - stock.adobe.com
    Sympetrum rouge sang, libellule actuelle

    Le groupe souche des paléoptères, lointains parents des odonates (libellules et demoiselles) et des éphémères, étaient aussi particulièrement abondants et diversifiés.

    © Camille Dégardin
    La mygale est une araignée qui ne tisse pas de toile

    En plus des insectes, d’autres arthropodes vivaient également sur la terre ferme, comme les myriapodes (comprenant les mille-pattes) mais aussi des prédateurs comme les scorpions et les araignées.

    © davemhuntphoto - stock.adobe.com

    * Qu'est-ce qu'un « groupe souche » ?

    Les espèces actuelles d’un groupe donné, et leurs plus proches parents éteints, ont toutes dérivé d’une espèce ancestrale commune. Ensemble, ces espèces forment le groupe couronne. Par opposition au groupe couronne, le groupe souche, lui, est composé des espèces disparues n’appartenant pas au groupe couronne mais qui sont plus proche de ce groupe couronne que de tout autre groupe.

    Prenons comme exemple le groupe des odonates, composé des libellules et demoiselles. Le groupe couronne existe depuis environ 250 millions d'années. Toutes les libellules actuelles, et leurs proches parents éteints, font partie de ce groupe couronne. Mais il y a plus de 250 millions d'années vivaient d’autres espèces très anciennes, proches des odonates mais plus anciennes qu'elles. Elles appartiennent donc au groupe souche des odonates. Meganeura monyi en fait partie. Elle n’est donc ni une libellule ni une demoiselle, mais un odonate souche.

    Comment certains insectes du Carbonifère ont-ils pu atteindre de si grandes tailles ?

    Meganeura monyi, libellule de 70 cm d'envergure, volant au-dessus d'un lac.

    Première représentation de Meganeura monyi. volant au-dessus d’un ancien lac de la région de Commentry. Illustration tirée de l’ouvrage « Insectes fossiles des temps primaires » de Charles Brongniart. Illustration par L. Sohier.

    © MNHN

    Le Carbonifère est souvent décrit comme « l’époque des insectes géants » : une description souvent exagérée par rapport à la réalité scientifique et influencée par une poignée d’espèces qui ne sont pas représentatives de l’époque. Parmi celles régulièrement mises en avant, une seule, Meganeura monyi, était réellement un insecte.

    On parle plutôt au Carbonifère d'une faune d'insectes très diversifiée, probablement dominée par quelques espèces de grande taille.

    En 2023, des paléontologues ont par exemple décrit une espèce de mégacécoptère (groupe éteint apparenté aux libellules, demoiselles et éphémères) du Carbonifère ayant une envergure de seulement 2 centimètres4.

    • 4Nan Yang, Dong Ren & Olivier Béthoux (2023) Small-sized Megasecopteromorpha (Insecta, Palaeoptera) occurred also in the Pennsylvanian, Historical Biology

    Les deux espèces du Carbonifère les plus mentionnées pour leur taille exceptionnelle sont Meganeura monyi et Arthropleura armata :

    • Les Meganeura appartiennent au groupe souche des libellules et demoiselles. Une espèce de ce groupe, Meganeura monyi, dépasse les 60 centimètres d'envergure. Cette envergure est proche de celle de faucons actuels, comme le faucon hobereau, prédateur des libellules.
    • Arthropleura armata n’est pas un insecte, il appartient au groupe des diplopodes, plus communément appelés mille-pattes. Il peut mesurer jusque 2,5 mètres de long pour cinquante centimètres de large5.

    Tous deux sont les plus grands spécimens connus de l’histoire pour leur groupe respectif, mais ils sont assez rares dans le registre fossile et au Carbonifère, ils faisaient figure d’exception. Des fouilles conduites dans les vingt dernières années révèlent que les insectes et autres arthropodes qui les entouraient n’étaient pas tous aussi grands : certains ne mesuraient même que quelques millimètres. Leurs fossiles sont longtemps restés inconnus du fait de leur petite taille, qui les rendait plus difficiles à remarquer sur le terrain.

    • 5W. D. Ian Rolfe and J. K. Ingham, 1967 — Limb structure, affinity and diet of the Carboniferous "centipede" Arthropleura. The limb of Arthropleura is shown to be uniramous and not biramous as suggested by Waterlot and accepted by all subsequent… Scottish Journal of Geology vol. 3, n° 1, p. 118-124.
    Megarachne servinei est un scorpion de mer, il est muni de 8 pattes.

    Megarachne servinei a été pris pour une araignée géante lors de sa découverte en 1980. Une étude en 2005 a permis de découvrir qu'il s'agissait d'un arthropode aquatique du groupe des euryptérides, ou scorpions de mer.

    © Nobu tamura

    Par ailleurs, une espèce du Carbonifère nommée Megarachne servinei a longtemps été prise pour une araignée géante. Il s’agissait en fait d’un scorpion de mer, ayant donc une vie exclusivement aquatique, et elle n'avait pas une taille exceptionnelle pour un animal de ce groupe.

    L'absence de prédateurs volants

    La principale explication de la grande taille de certains insectes ou arthropodes du Carbonifère est l’absence d'autres grands prédateurs volants. Les reptiles volants et les oiseaux apparaîtront en effet plus de cent millions d’années plus tard, au Mésozoïque.

    Le taux de dioxygène (O2) élevé dans l'air au Carbonifère est aussi régulièrement mis en avant comme un facteur important favorisant le gigantisme. Mais cette hypothèse est partiellement contredite par la persistance de libellules de grande taille jusqu'au Trias, où le taux d'O2 était plus bas. D'autres arthropodes géants ont également vécu à d'autres périodes. Le taux d'O2 atmosphérique peut avoir joué un rôle, mais celui-ci reste secondaire par rapport à l'absence de prédateurs tels que les reptiles.

    Larve de phanéroptère, proche des sauterelles, munis de six pattes et de longues antennes

    Cette larve de phanéroptère actuelle est munie de six pattes et de deux longues antennes. Ses deux pattes arrière sont de grande taille. Sa morphologie est très proche de celle des phanéroptères adultes.

    © MNHN - N. Cellier

    Ni chenilles, ni asticots

    Les groupes d’insectes les plus représentés au Carbonifère ont tous un cycle de vie dont la forme larvaire est très proche de la forme adulte. À l’image des sauterelles actuelles, leur croissance se fait par mues successives, sans que leur anatomie ne change de façon majeure.

    Aujourd'hui, au contraire, plus de 80 % des insectes font partie des holométaboles, ou insectes à métamorphose complète, dont le cycle de vie passe par un stade larvaire à la morphologie singulière puis un stade nymphal (chrysalide, cocon...), avant le stade adulte.

    Au Carbonifère, il n’y avait par exemple ni papillons (qui ont pour stade larvaire la chenille), ni diptères (dont les mouches, qui ont pour stade larvaire l’asticot), ni abeilles, ni fourmis, ni coléoptères (dont font partie les scarabées).

    Les holométaboles sont tout de même présents au Carbonifère mais représentent alors une fraction infime des espèces d’insectes. Cela laisse penser que la métamorphose complète n’a pas été un atout majeur dans un premier temps. Elle le sera probablement une centaine de millions d’années plus tard, au Trias6, quand les holométaboles deviennent très communs dans tous les gisements fossiles de la planète.

    • 6Nel, A., Roques, P., Nel, P., Prokin, A.A., Bourgoin, T., Prokop, J., Szwedo, J., Azar, D., DesutterGrandcolas, L., Wappler, T. Garrouste, R., Coty, D., Huang, Diying, Engel, M. and Kirejtshuk, A.G. The earliest-known holometabolous insects. Nature, 16 octobre 2013.

    Les tétrapodes des forêts carbonifères

    Le Carbonifère est également connu pour être la période où les premiers amniotes – ancêtres des reptiles, oiseaux et mammifères – sont apparus. Ce groupe a développé certaines caractéristiques, dont des œufs à coquille étanche, permettant un mode de vie exclusivement terrestre, avec notamment l'apparition des premiers reptiles.

    Mais cette période a aussi été le théâtre de très grande diversification pour de nombreux autres tétrapodes, à la fois terrestres et aquatiques : les amphibiens.

    Qu'est-ce qu'un tétrapode (Tetrapoda)

    Les premiers tétrapodes, du grec signifiant « quatre pieds », sont des vertébrés possédant quatre pattes munies de doigts. Ils sont issus de groupes de « poissons à nageoires charnues », ou sarcoptérygiens, dont font partie les cœlacanthes et dipneustes actuels. Les premiers tétrapodes possèdent également des proto-poumons. Ce groupe est aujourd’hui représenté par les amphibiens, les reptiles, les oiseaux et les mammifères. Certains groupes ont perdu leurs pattes au cours de leur histoire évolutive, comme les serpents, mais appartiennent tout de même au groupe des tétrapodes.

    Ichthyostega est un grand tétrapode muni d'une grande queue lui servant à nager, ses pattes arrières sont orientées vers l'arrière du corps

    Bien qu’il ait d’abord été considéré comme un animal partiellement terrestre, les pattes arrière d’Ichthyostega stensioei étaient orientées vers l’arrière et non vers le dessous. S'il avait pu se déplacer hors de l’eau, il ne l’aurait pas fait en marchant mais plutôt en rampant.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura

    Héritage du Dévonien

    Les premiers tétrapodes sont apparus et se sont diversifiés dès le Dévonien supérieur, il y a environ 370 millions d’années. Ils peuplaient les milieux humides où leurs pattes et leurs poumons leur permettaient de se déplacer et de respirer dans des zones marécageuses de faible profondeur et peu chargées en oxygène. Il est possible qu’ils se soient déplacés hors de l’eau, mais probablement en rampant plutôt qu'en marchant.

    Les pattes des tétrapodes sont ainsi apparues comme des nageoires particulières. Elle prendront un rôle majeur au bout de plusieurs millions d’années, en permettant à ces animaux de porter leur corps dans le contexte de la marche. Cette apparition d’une fonction majeure, à partir d’un caractère apparu beaucoup plus tôt, est un phénomène appelé « l’exaptation ». Un autre exemple d'exaptation, plus récent, est l'apparition des plumes chez les dinosaures, qui précède de plusieurs millions d'années l'apparition du vol.

    Fossile de Pederpes montrant une tête triangulaire, une ceinture scapulaire, une colonne vertébrale et une ceinture pelvienne

    Ce fossile de Pederpes finneyae, conservé au Huntarian Museum de Glasgow, date d’il y a environ 348 millions d’années. Il est l’un des très rares fossiles apportant des informations sur l’évolution des tétrapodes pendant le début du Carbonifère.

    © The Hunterian, University of Glasgow

    La lacune de Romer

    Le début du Carbonifère est marqué par la rareté des fossiles de tétrapodes. Très peu de ces fossiles sont retrouvés pour la période datant de la fin du Dévonien au milieu du Carbonifère, soit il y a environ 335 à 360 millions d’années. Cette période est appelée « lacune de Romer », d’après le paléontologue américain Alfred Sherwood Romer qui remarqua la rareté des fossiles de tétrapodes dans ce registre fossile.

    Cependant, les plus anciens tétrapodes connus précèdent cette période et une grande diversité de tétrapodes d'il y a environ 330 millions d'années, soit après la lacune de Romer, est connue. Cela permet de déduire qu'une forte diversification a eu lieu durant la lacune de Romer, avec l’apparition de nombreux groupes de tétrapodes, dont plusieurs ont pu vivre partiellement hors de l’eau.

    Eogyrinus est un grand tétrapode aquatique muni d'une grande queue lui servant de nageoire

    Les Pholiderpeton pouvaient mesurer jusqu'à 4 mètres. Bien que munis de pattes, il étaient des prédateurs essentiellement aquatiques avec une nage proche de celle des anguilles.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura

    Une grande diversité d'amphibiens

    De nombreuses espèces d’amphibiens peuplent les zones humides de la Pangée. Ces espèces héritent, de leurs ancêtres aquatiques, des poumons et des pattes. Dans les forêts du Carbonifère, très humides, ces caractères leur permettent de survivre un peu de temps hors de l’eau, et de s’y déplacer, avec plus ou moins d’habileté.

    Les plus grands amphibiens vivaient probablement la majeure partie de leur vie dans l’eau, à l’image des salamandres géantes du Japon et des crocodiles actuels, et se déplaçaient laborieusement hors de l’eau. Les plus petites espèces, moins lourdes, marchaient avec davantage d’aisance.

    Tuditanus a une apparence proche à la fois des salamandres actuelles et des lézards actuels

    Tuditanus appartenait au groupe Microsauria et mesurait autour de 24 cm. Malgré les apparences ce groupe est distinct des reptiles. Il a évolué vers une forme terrestre indépendamment de ceux-ci.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura

    L'environnement des forêts du Carbonifère est maintenu humide par la densité de la végétation et le climat tropical. Une nourriture abondante évolue hors de l’eau (les insectes et certains arthropodes), où vivent encore peu de prédateurs ou de concurrents. C’est à cette période que les premiers groupes d’amphibiens connaissent une grande diversification.

    On ne parle alors pas d’un seul groupe qui adopte un mode de vie partiellement terrestre, mais bien de plusieurs groupes d’espèces qui passent d’un mode de vie purement aquatique à un mode de vie en partie terrestre. La majorité des tétrapodes d’alors sont encore dépendants du milieu aquatique, notamment pour s’y reproduire et pondre, malgré leur capacité à respirer et se mouvoir hors de l’eau à l’âge adulte.

    La forme adulte des Microbrachis porte des branchies externes et ressemble aux larves des salamandres actuelles

    Microbrachis pelikani. Certains amphibiens du Carbonifère ressemblaient, même à l’âge adulte, aux larves de tritons et salamandres actuels, et donc aux axolotls.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura
    Les Phlegethontiae sont de très longs amphibiens serpentiformes, chez qui les pattes avaient déjà disparu.

    Phlegethontia longissima. Les pattes ont pu réduire en taille, et même complètement disparaître chez certains groupes dès le Carbonifère, comme chez les aistopodes et les lysorophiens, ou beaucoup plus tard chez les serpents et les orvets.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura

    Le mode de vie terrestre des amniotes

    Parmi les tétrapodes du Carbonifère, un groupe s’affranchit entièrement du milieu aquatique. Il s’agit des amniotes : ils n’ont plus besoin de pondre ni de se reproduire dans l’eau et peuvent se nourrir et vivre exclusivement sur la terre ferme. Les dinosaures, les oiseaux, les reptiles et les mammifères sont tous des descendants des premiers amniotes.

    Hylonomus ressemble à un lézard actuel

    Hylonomus lyelli est un amniote insectivore mesurant environ 20 centimètres de long. Il appartient à la lignée des sauropsides, dont descendent les reptiles actuels.

    CC BY-NC-ND 3.0 Nobu tamura

    Les amniotes possèdent une ossature et une musculature leur permettant de complètement porter leur corps avec leurs pattes, mais c’est l’œuf amniotique qui leur permet de s’affranchir du milieu aquatique pour se reproduire. Cet œuf est muni d’une coquille étanche et est rempli de liquide, ce qui leur permet de pondre hors de l’eau. Cependant, la paroi des premiers œufs amniotiques est molle, pas encore minéralisée comme les œufs des oiseaux actuels.

    Si aucun fossile d’œuf de tétrapode datant du Carbonifère n’est connu, il est possible d’estimer à quelle date est apparu celui-ci car on connaît de nombreuses espèces qui ont hérité de cette innovation. On peut alors estimer la date d’apparition de ce trait chez un ancêtre commun, cette méthode est appelée l’optimisation phylogénétique.

    Du Carbonifère à aujourd’hui, deux groupes distincts sont connus au sein des amniotes. De ces groupes descendent tous les groupes de tétrapodes non-amphibiens actuels. Ces deux groupes d’amniotes sont :

    • les sauropsides, dont descendent les reptiles et les dinosaures (comprenant les oiseaux) ;
    • les synapsides, dont descendent les mammifères.

    Ces groupes étant adaptés à la vie hors de l’eau, ils seront peu impactés7 par la crise qui affecte les zones humides de la Pangée à la fin du Carbonifère : l’effondrement de la forêt pluviale du Carbonifère. Cette crise provoquera la disparition de nombreuses espèces d'amphibiens du fait de l'aridification des milieux humides.

    • 7Dunne, E.M., Thompson, S.E.D., Butler, R.J. et al. Mechanistic neutral models show that sampling biases drive the apparent explosion of early tetrapod diversity. Nat Ecol Evol 7, 1480–1489 (2023).

    L'effondrement de la forêt carbonifère

    A la fin du Carbonifère, une crise mondiale touche la vie à la surface de la Pangée. Cette crise, appelée l'effondrement de la forêt pluviale du Carbonifère, est la première des deux grandes extinctions qui toucheront les plantes terrestres, la deuxième étant l'extinction Permien-Trias.

    L’effondrement de la forêt Carbonifère est provoqué par une période d'aridification du climat et d’assèchement des zones humides de la Pangée. Près de la moitié des familles de plantes, très dépendantes de ces milieux, s'éteignent. Un groupe particulier de plantes, adapté à des environnements plus secs, résistera mieux à la crise et deviendra bien plus présent dans les écosystèmes : il s'agit des premiers conifères.

    La fin de l'ère du charbon

    La formation du charbon dans le sol ne s'arrête pas avec cette crise, mais diminue drastiquement il y a environ 300 millions d’années. Cela est corrélé à l’apparition de plusieurs espèces de basidiomycètes, un groupe de champignons capables de digérer la lignine présente dans les troncs des arbres11. Cela permet la dégradation des déchets végétaux, ce qui diminue fortement leur fossilisation et leur transformation en charbon.

    • 11Dimitrios Floudas et al., The Paleozoic Origin of Enzymatic Lignin Decomposition Reconstructed from 31 Fungal Genomes. Science. 336, 1715-1719 (2012). doi.org/10.1126/science.1221748

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    Remerciements à Olivier Bethoux, maître de conférence, chargé de collection et d'enseignement au CR2P - UMR 7207 ; Anaïs Boura, maître de conférence, chargée d'enseignement au CR2P - UMR 7207 ; Léa de Brito ATER au CR2P - UMR 7207, Grégoire Egoroff ; géologue à l'UAR Patrinat et Damien Germain, maître de conférence, chargé de collection et d'enseignement au CR2P - UMR 7207.

    Image de haut de page aimablement fournie par le Field Museum