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Qui a fabriqué les premiers outils ?
Le plus vieil outil du monde est daté de 3,3 millions d’années. À partir de cette donnée, il est possible d’identifier des potentiels artisans : qui sont‑ils ?
Dans la Galerie de l’Homme, face à Lucy, le célèbre australopithèque, se trouve une vitrine qui rassemble de nombreux artefacts lithiques. Un moulage du plus vieil outil du monde y est exposé.
Cet outil a été retrouvé sur le site archéologique de Lomekwi, au Kenya. Il est daté de 3,3 millions d’années. À partir de cette donnée, pouvons-nous deviner l’identité des artisans potentiels des premiers outils ?
Les candidats potentiels
Un premier suspect
Avec sa face plate et peu projetée vers l’avant, cette espèce découverte à Lomekwi au Kenya porte bien son nom : Kenyanthropus platyops ! Son crâne, de petite taille, est daté de 3,5 millions d’années.
Étant donné que certains spécimens attribués à cette espèce ont été retrouvés au même endroit que les plus vieux outils du monde, il est probable qu’ils aient fabriqué ces outils.
Les Australopithèques
L’espèce à laquelle appartient la fameuse Lucy, Australopithecus afarensis, est la mieux connue. Des traces de découpes sur des os de mammifères datées de 3,4 millions d’années, qui indiquent une utilisation d’outils, ont d’ailleurs été trouvées à proximité de restes attribués à cette espèce.
Mais elle n’est pas la seule : elle est notamment contemporaine d’Australopithecus bahrelghazali découvert 3 500 kilomètres à l’Ouest et qui a vécu il y a 3,5 millions d’années.
Au vu de leur ancienneté, ces espèces pourraient faire partie des artisans des premiers outils lithiques.
Les Paranthropes et les premiers représentants du genre Homo
Pendant longtemps les Paranthropes n’ont pas été considérés comme les potentiels artisans de galets taillés sur une face ou deux, appelés « Oldowayens ». Pourtant, ils sont contemporains de cette industrie du Paléolithique inférieur et des premiers représentants du genre Homo qui eux sont les artisans supposés des artefacts lithiques attribués à l’Oldowayen.
Les Paranthropes ont parfois été trouvés associés à des restes archéologiques qui ont servi à découper des restes d’animaux ou de végétaux. Ceux d’Afrique australe (Paranthropus robustus) ont également utilisé des outils en os.
Le saviez-vous ?
Les grands singes peuvent casser des noix avec une enclume. Ils sont aussi capables d’extraire des éclats d’un bloc. Mais contrairement aux Humains, ils ne vont pas les utiliser.
Des artisans hors pairs
Les techniques de fabrication
Les hominines avaient compris comment sortir des éclats d’un bloc. Pour ce faire, ils utilisaient soit un bloc et une enclume ; soit un bloc et un percuteur ; soit un bloc, un percuteur et une enclume. Ils avaient deux types de percuteurs : des durs (en roche) et des tendres (en bois animal ou végétal).
Ensuite, pour tailler leurs outils, ils pouvaient se servir de leurs deux mains ou bien tenir le bloc d’une main et le percuteur de l’autre. Avec une vitesse d’accélération suffisante, ils pouvaient extraire un éclat.
Les matières premières qu’ils allaient chercher au bord des rivières étaient choisies avec soin. Ils ne récoltaient pas seulement du basalte mais aussi de l’obsidienne, du quartz etc., en fonction de leur environnement.
Les différents types d’outils
Il existe diverses cultures lithiques qui ont leur propres outils caractéristiques. L'Oldowayen en est une, mais il y a aussi :
● Le Lomekwien : la plus ancienne industrie lithique. Elle doit son nom au site archéologique de Lomekwi 3. Les outils sont particulièrement volumineux.
● L’Acheuléen : le nom de cette civilisation préhistorique est tiré du gisement de Saint-Acheul (Amiens). Un outillage datant du Paléolithique inférieur y a été découvert. La pièce maîtresse de cette culture est le biface.
Des avantages morphologiques ?
Pour fabriquer des outils, il fallait avoir une certaine dextérité. Les scientifiques procèdent à l’analyse des os de la main pour voir s’ils étaient capables de tenir ces outils.
La taille du cerveau est-elle également un paramètre à prendre en compte ? Pas vraiment. Certes, la conception de ces outils nécessite une capacité cognitive suffisamment développée, mais ce n’est pas parce qu’on a un gros cerveau qu’on fabrique automatiquement des outils sophistiqués. Le volume du cerveau est moins important que la manière dont il est organisé.
À quoi servaient ces outils ?
Des traces de découpe sur des restes animaux ont été découvertes sur des sites archéologiques. Ces premiers outils auraient donc pu servir à découper de la viande (obtenue par charognage) ou du végétal.
L’analyse dentaire des premiers Humains éclaire sur leur régime alimentaire. La longueur de leurs bras et de leurs phalanges est le signe qu’ils pouvaient grimper aux arbres. Les scientifiques ont ainsi réalisé que les premiers Humains et les Paranthropes pouvaient manger de tout : des feuilles, des fruits, de la viande mais aussi des ressources marines ou des insectes ! Des outils en os retrouvés en Afrique du Sud servaient notamment à capturer des insectes comme les termites, par exemple.
Article rédigé en juin 2023. Remerciements à Sandrine Prat, paléoanthropologue au Musée de l’Homme (MNHN) et directrice de recherche au CNRS, pour sa relecture et sa contribution.
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