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Définition
Qu’est-ce que la bioluminescence ?
La bioluminescence est un phénomène chimique qui permet à des organismes d'émettre de la lumière. Elle est liée à la réaction entre une protéine (appelée "luciférase") et une molécule très énergétique (dite "luciférine"), en présence d’oxygène.
Quels animaux sont bioluminescents ?
La bioluminescence est une caractéristique que l’on retrouve sur toute la planète et très souvent parmi les espèces marines vivant dans les profondeurs. En effet, on estime que dans l’océan, à partir de 4 000 mètres sous la surface, près de 75 % des espèces sont capable de produire de la lumière. Les cnidaires par exemple (coraux, méduses, anémones de mer…) seraient à 97 % bioluminescents. Plus commun dans votre jardin, le groupe des lucioles peut aussi émettre de la lumière. Très peu d’espèces aériennes sont dotées de cette capacité.
À quoi sert la bioluminescence ?
Très importante du point de vue écologique, la bioluminescence rend de nombreux services aux organismes dotés de cette caractéristique. En effet, dans des environnements très sombres, la lumière permet aux animaux d’attirer des congénères pour se reproduire, ou des proies pour se nourrir. L’exemple de la baudroie, rendue particulièrement célèbre par le film d’animation Le monde de Nemo, illustre parfaitement cet usage : son leurre lumineux attire de petites proies dont la baudroie se nourrit. La bioluminescence permet également d’envoyer des signaux de détresse ou de désorienter un prédateur, comme le font les dinoflagellés. Face à une stimulation provoquée par le mouvement, les dinoflagellés produisent de courts flashs durant moins d’une seconde. Ces flashs empêchent certains crustacés de les consommer et leur permet ainsi de survivre. L'émission de lumière permet également de réaliser des parades nuptiales, comme chez les lucioles.
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Un camouflage en pleine lumière
Dans l’obscurité des profondeurs marines, entre 300 et 1 000 mètres sous la surface, les organismes ont besoin de duper leurs prédateurs afin de survivre. Les scientifiques ont observé que des animaux montrent une caractéristique assez intéressante : si leur face dorsale est de couleur sombre, leur face ventrale est bien plus claire voire lumineuse. En effet, aux yeux des prédateurs qui pourraient les observer du dessous, ils imitent la couleur de la surface, plus claire que le reste de leur environnement ! Du haut, ils imitent parfaitement la couleur de l’abîme. Cette technique, utilisée par Cyclothone pallida parmi d’autres, a inspiré de nombreuses techniques de camouflages lors de la Seconde Guerre mondiale.
Mécanismes pour émettre de la lumière
Pour être bioluminescents, les organismes vivants peuvent adopter l’un de deux procédés actuellement connus.
Le premier, le plus courant, est celui de la réaction entre un produit chimique, une luciférine, et une enzyme, une luciférase. Ce type de réaction peut prendre des formes très différentes par la diversité des combinaisons possibles. En effet, il existe au moins une trentaine de luciférines, appartenant toutes à des groupes chimiques pouvant être très distincts. Les luciférases, ces enzymes clefs de la réaction de bioluminescence, sont aussi très diversifiées. Dans l'océan, la lumière émise selon ce procédé sera bleue : elle est en effet beaucoup plus visible dans l’eau que les autres couleurs. Sur terre, cette couleur est plus souvent jaune ou verte.
Le second procédé se passe en 2 étapes.
Tout d’abord, l’organisme émet un photon bleu selon le procédé décrit ci-dessus. Cependant, celui-ci n’a même pas le temps de "quitter" l’organisme car il est immédiatement absorbé par une autre molécule : une protéine fluorescente verte ("Green Fluorescent Protein", aussi connue sous l’acronyme GFP). Après cette absorption d'énergie, la molécule fluorescente se retrouve dans un état excité et émet un photon qui, cette fois, quitte l’organisme. Ce photon émit sera d’une énergie plus faible que celui reçu : la lumière produite sera donc verte. Aujourd'hui, les cellules productrices de lumière chez les espèces bioluminescentes sont désignées comme des "photocytes". Ces cellules peuvent être isolées, ou bien être toutes regroupées dans un seul organe.
Apparition du caractère de la bioluminescence
La diversité des fonctions et des mécanismes de production de lumière par les organismes démontre que l’apparition de la bioluminescence s’est faite plusieurs fois, de façon indépendante et dans des embranchements d’espèces très différents. On date pour l’instant au Précambrien la première apparition de la bioluminescence.
La bioluminescence n’est pas de la fluorescence !
Attention, la fluorescence naturelle existe aussi, pour autant il ne s’agit pas du même mécanisme. La fluorescence naturelle signifie qu’une molécule de l’organisme (comme le fluor) absorbe de l’énergie lumineuse (comme celle de la lumière bleue provenant du soleil) et devient excitée. Ensuite avec un délai plus ou moins long, cette molécule se désexcite et émet de l’énergie (moins que celle qu’elle a captée) sous forme d'un photon. L’organisme peut ainsi émettre du vert, du jaune, du rouge… Ce mécanisme est utilisé par certains animaux dans le cadre de la communication et de la reconnaissance des individus.
Un ballet lumineux
La bioluminescence sert parfois aux animaux pour communiquer entre eux. Il peut arriver que tout un banc de crustacés s’illumine, c’est un spectacle remarquable ! Les lucioles, elles aussi, peuvent participer à ces jeux de lumières : on dit que leur clignotement est synchrone.
La recherche au Muséum
Au sein de l’UMR 7196 (STRING), des scientifiques travaillent sur la bioluminescence, très utilisée en sciences de la vie pour caractériser ou détecter des protéines (qui peuvent être virales ou bactériennes par exemple) et les doser in vitro ou in vivo.
En synthétisant des analogues de luciférine et en mutant les luciférases, les scientifiques ont pu altérer les caractéristiques des signaux lumineux. L’équipe de chimistes du Muséum a ainsi obtenu des luciférines artificielles conduisant à un signal de couleur bleue, très intense et de très longue durée, en présence d’une luciférase modifiée ayant pour origine la crevette Oplophorus gracilirostris.
En collaboration avec de nombreuses équipes de biologistes, ils travaillent à présent sur la mise au point d’autres combinaisons luciférine/luciférase (de systèmes rapporteurs bioluminescents) pour obtenir des signaux le plus intense possible mais de couleur rouge. Ceci conduirait par exemple à une très grande simplification des protocoles d’analyses d’échantillons sanguin tout en conservant une forte sensibilité. Ils permettront aussi d’augmenter significativement l’efficacité de détection de virus ou de bactéries in vivo.
Par ailleurs, l’identification de nouvelles luciférases contribuera aussi à la compréhension de l’apparition et l’évolution de la bioluminescence. Un des sujets de recherche de l’UMR 7196 porte ainsi sur la méduse des profondeurs Periphylla periphylla dont la luciférase n’a pas encore été caractérisée.
Article rédigé en septembre 2024.
Relecture et contribution
Yves-Louis Janin
Directeur de recherche au Muséum national d'Histoire naturelle (Structure et Instabilité des Génomes - UMR 7196)
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