Stylets pour combats de scarabées
La collection d’ethnoécologie compte plusieurs objets associés aux jeux et aux loisirs des hommes, entre eux et avec le monde vivant.
Dans le Nord de la Thaïlande, les combats de coqs laissent place, à la fin de la saison des pluies, à l’organisation de combats de scarabées rhinocéros du genre Xylotrupes. Officiels ou clandestins, ces combats sont l’objet de paris et drainent des passionnés de tous les horizons.
Permettant de tester les qualités des insectes, les stylets constituent des outils de médiation essentiels du jeu. Avant les combats, les joueurs soumettent leurs scarabées à plusieurs tests de réactivité. À l’aide, soit d’un stylet, soit du bout du doigt, ils en vérifient les réactions (les « nerfs »). Une manipulation essentielle consiste à faire fléchir la tête du scarabée pour ouvrir au maximum l’écart entre les deux cornes et ainsi estimer la surface de saisie.
Une fois une paire de combattants sélectionnée, chaque propriétaire s’installe à une extrémité d’une plate-forme sur laquelle a été installé un rondin de bois contenant une ou deux femelles. Pendant la phase d’échauffement, le joueur prépare son scarabée en simulant la présence de l’opposant à l’aide de son stylet. Puis, au moment du « lâcher », le stylet sert encore à guider le scarabée vers son adversaire. Au cours de l’affrontement, les propriétaires ne peuvent plus toucher directement les animaux mais essayent néanmoins d’influencer le déroulement du combat, soit en frottant ou en frappant le stylet sur le rondin pour stimuler le scarabée, soit en agissant sur l’inclinaison du rondin. Le joueur dont le coléoptère est en position défavorable cherchera ainsi à faire pivoter le rondin pour rétablir la situation en sa faveur et permettre à l’insecte de ressaisir son adversaire, tandis que l’autre joueur essayera de maintenir sa propre position.
Selon les qualités imparties et les préférences des joueurs, les stylets sont taillés dans différents matériaux (bois, bambou, corne, métal), auxquels est parfois ajoutée une petite sonnaille, toujours dans l’idée de stimuler les insectes.
Rennesson S., Grimaud. E., Césard, N, 2012, Le scarabée conducteur. Le jeu de kwaang, entre vibration et coopération, Terrain 58, 94-107.