5 idées reçues sur la théorie de l’évolution

C'est une des plus célèbres théories scientifiques mais aussi une des plus incomprises. Faisons le point sur les contresens et raccourcis les plus courants sur la théorie de l’évolution de Charles Darwin.

« L'évolution n'est qu'une théorie »

Pour les sciences, le terme de « théorie » ne signifie pas « non prouvé ». Comme la théorie de la gravité ou de la relativité, une théorie scientifique sert à expliquer un ensemble de faits et d'observations qui se recoupent et peuvent se vérifier par l’expérience.

Il y a bien en même temps une théorie de l’évolution et des faits d’évolution. Une théorie n’est pas figée et peut être développée ou réfutée par de nouvelles découvertes scientifiques.

Depuis la parution de son ouvrage fondateur « L’origine des espèces », la théorie darwinienne de l’évolution a été mise à l’épreuve de 150 ans d’avancées scientifiques et reste à ce jour la seule valide.

Pourquoi observe-t-on de la régularité à court terme et du changement à long terme chez les êtres vivants ? Pour Charles Darwin, la réponse se trouve dans la sélection naturelle, moteur de la théorie de l'évolution dont il énonce les principes dans « L'origine des espèces » paru en 1859.

« L'être humain descend du singe »

Dessin satyrique de 1874 représentant Charles Darwin

Dessin satyrique de 1874 représentant Charles Darwin

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Si l’on entend par « singe » l’ensemble des primates, la phrase exacte est que l’humain est un singe. Par conséquent, les ancêtres communs à tous les primates sont aussi les siens.

Quant aux chimpanzés ou aux bonobos avec lesquels nous partageons beaucoup (98 % de nos gènes codants), ils ne sont pas nos ancêtres pour autant.

Si nous partageons bien un ancêtre commun (un singe hominoïde), nos lignées se sont séparées il y a plusieurs millions d’années. Les autres espèces de grands singes sont donc plutôt des cousins ! Depuis cet ancêtre commun hominoïde, tous les grands singes, Homo sapiens compris, n’ont cessé d’évoluer.

L'évolution de l'Homme

Cette illustration publiée dans le livre The Early Man paru en 1965 véhicule plusieurs idées erronées sur l’évolution : l’humain se serait « redressé » au cours de l’évolution ; il y aurait un sens unique de l’évolution dont l’humain serait la forme la plus aboutie.

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Toutes les espèces partagent des traits communs et des liens de parenté. Savez-vous, par exemple, que les humains partagent aussi 35 % de gène avec la jonquille, 60 % avec la banane, ou encore 70 % avec l’oursin ? Nous avons d’ailleurs tous un ancêtre commun : LUCA (Last Universal Common Ancestor).

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Notre ancêtre LUCA

« Seuls les plus forts survivent »

Carnotaure Galerie de Paléontologie

Carnotaure Galerie de Paléontologie

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Loin du cliché de la loi de la jungle, la sélection naturelle ne signifie pas forcément la sélection du plus fort. Prenons le cas des dinosaures : parmi ce bestiaire qu'on présente toujours comme féroce, seules les plus petites espèces ont survécu, dont les représentants actuels sont les oiseaux.

Les individus capables de surmonter une modification de leur environnement, l’émergence de nouveaux prédateurs, ou encore de virus, seront les plus à même de se reproduire et de transmettre leurs capacités. Ainsi, au fil du temps, c’est la population entière qui s’adapte.

Par ailleurs, si la sélection naturelle peut engendrer la compétition, elle peut aussi favoriser la coopération chez les espèces. D’autres facteurs, comme la sélection du plus séduisant (sélection sexuelle) vont aussi jouer un rôle.

On peut donc lutter pour sa survie (“struggle for life”) sans forcément nuire à d’autres vivants.

Aucune espèce n’est supérieure ou plus évoluée qu’une autre. Tous les êtres vivants évoluent et ce degré d’évolution n’est pas quantifiable. Chez les animaux, comme chez les végétaux, les mutations génétiques et d’autres changements sont constamment à l’œuvre, sources d’une évolution permanente.

« La nature est bien faite »

Œil d'aigle européen

Œil d'aigle européen

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On pourrait aussi bien opposer à cet adage que « la nature est cruelle » ou que « la perfection n’est pas de ce monde »… Mais la théorie de l’évolution ne prête aucune intention, bonne ou mauvaise, à la nature. Pas plus qu’elle n’induit une amélioration des capacités du vivant ni son cheminement vers un progrès.

D’ailleurs, le mécanisme de sélection est loin d’être parfait : certains caractères peuvent être contingents, inutiles, voire contraignants. Ils peuvent persister chez des individus et leurs descendants, puis se révéler défavorables pour l’espèce. Parfois, dans les petites populations, il suffit aussi de morts accidentelles pour que certains caractères, alors avantageux, cessent de se transmettre.

L’harmonie apparente de la nature masque le coût élevé de la sélection naturelle, où la survie est l’exception et la mort la règle. Le vivant est donc sans cesse mis à l’épreuve de se reproduire au gré de variations génétiques et environnementales imprévisibles.

La sélection naturelle ne mène pas à la perfection mais à des compromis qui permettent à une population d’être adaptée à un milieu, à un moment précis. Cet « optimum » est mouvant et ne peut être anticipé (à l’opposé de l’utopie eugéniste).

« Tout ça ne peut pas être le fruit du hasard »

Girafe dans la savane

Girafe dans la savane

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On pourrait croire que si la girafe a un long cou, c’est pour qu’elle puisse se nourrir dans les arbres… C’était aussi la thèse de Lamarck à la fin du XVIIIe siècle, qui soutient que l’évolution répond à un besoin des organismes.

Ce n’est pas le cas de Darwin, qui y voit une conséquence : si la girafe a un long cou c'est parce que, parmi des girafes aux cous de longueurs variables, celles qui pouvaient se nourrir dans les arbres ont pu se reproduire plus facilement, dans un environnement où les arbres étaient hauts : c’est la sélection naturelle.

Pour Darwin, le hasard est le point de départ  : il génère une infinité de variations (qu’illustre la diversité des membres d’une même espèce) dans un environnement qui, sur la durée, va faire le tri. Les variants qui laisseront le plus de descendants façonneront la population à venir.

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