L'homosexualité chez les animaux est-elle répandue ?

Les comportements homosexuels sont fréquents chez de nombreuses espèces animales. S’ils ont jusqu’à présent été peu étudiés et présentés, une chose est sûre : en termes de sexualité, les animaux savent être inventifs !

Depuis les années 1990, les sciences du comportement animal montrent la très grande diversité des comportements qui engagent la stimulation des organes sexuels dans toutes les espèces animales. Des comportements homosexuels sont documentés par cette littérature pour un grand nombre d’espèces. On peut citer l’exemple des primates les plus proches de l’Homme au plan phylogénétique, les Bonobos. Dans cette espèce, la sexualité n’est constituée qu’à 50 % de rapports entre des mâles et des femelles.

Ces données ont commencé à être discutées seulement récemment dans le champ scientifique pour deux raisons.

  • La première tient à l’obstacle épistémologique que constitue la stigmatisation de l’homosexualité dans les sociétés occidentales : des chercheurs ont pendant longtemps omis de publier leurs observations sur les sociétés animales de peur d’être eux-mêmes taxés d’homosexuels.
  • Une seconde raison a trait au cadre théorique hyper sélectionniste dans lequel les recherches sur la sexualité animale ont été menées jusqu’ici : ce cadre prédit que seuls les comportements sexuels engageant des mâles et des femelles peuvent être sélectionnés. Les autres comportements, n’étant pas utiles à la reproduction, ne devraient pas être retenus par l’évolution.

Un cadre théorique erroné

Deux manchots royaux dans un paysage de neige.

Couple de manchots royaux

© O. Prosický - stock.adobe.com

Des théoriciens de la biologie ont montré que ce cadre théorique est fautif. D’une part, il sous-entend que la reproduction est la finalité de la sexualité, alors qu’elle est l’agent même de toute sélection. D’autre part, il implique que les comportements sexuels sont un phénomène homogène alors qu’ils sont le résultat d’un très large faisceau de sélections. La nature "bricole", comme a dit François Jacob.

Cependant, si les sensations gratifiantes (de quelque nature qu’elles soient) sont la caractéristique princeps qui décide de la motivation des animaux pour le sexe, c’est aussi la première caractéristique à être positivement sanctionnée par la reproduction (sélectionnée). Il se trouve que, suivant les possibilités morphologiques de chaque espèce, les animaux ne sont pas en manque de créativité en ce domaine !

Article rédigé en 2015. Priscille Touraille, Chargée de Recherche au Muséum d’histoire naturelle (UMR 7206, Éco-anthropologie)

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