Vaut-il mieux manger des animaux sauvages ou des animaux d'élevage ?

Historiquement, la consommation d'animaux sauvages (gibier) était un privilège réservé aux nobles. Il est resté aujourd'hui un met d’exception au restaurant, dont les gourmets se régalent lorsque la saison de la chasse est ouverte. Alors, plutôt lièvre ou lapin ?

Une consommation risquée

La question doit être décomposée, d'abord car il y a d'un côté l'aspect hédonique (goût, plaisir) et de l'autre, les aspects sanitaires et écologiques. Ensuite, parce qu'il y a les produits terrestres (viande) et les produits marins (poissons, crustacés).

Considérons d'abord les animaux terrestres. Depuis la fin de la préhistoire, la biomasse des mammifères sauvages a décliné de plus de 80 %. Plus précisément, on comptait en masse relative de mammifères vertébrés 1 % d'humains et 99 % d'animaux sauvages il y a 10 000 ans (la chasse allait donc de soi), contre 32 % d'humains, 67 % d'animaux d'élevage et 1 % d'animaux sauvages aujourd'hui. Bref, la chasse est devenue anecdotique (à l'échelle de la planète en tous cas ; mais il subsiste bien sûr des peuples de chasseurs) et nous consommons avant tout des herbivores (vaches, moutons…) ou omnivores (poules, cochons…) issus de l'élevage.

Après, élevage ou sauvage, se pose la question des zoonoses, comme on a pu le voir avec l'épidémie de COVID dont l'origine pourrait être le braconnage de pangolin, mammifère porteur du virus et très recherché pour la gastronomie et la médecine chinoise, tout comme quelques années plus tôt, l'épidémie d'Ebola trouverait son origine dans la consommation de viande de brousse (singes). Mais l'élevage ne fait pas mieux : maladie de Creutzfeldt-Jakob (apparue en Angleterre dans les années 80 à partir d'un élevage de vaches), grippe aviaire (apparue à Hong-Kong à la fin des années 90 dans un élevage de poulets), etc. Le contact avec les animaux n'est jamais sans risque !

Manger en restant responsable

Photo d'un chalutier vu de face, poursuivi par des mouettes

Chalutier

© R. Bouwman - stock.adobe.com

Côté poissons, le problème est un peu différent, puisque ceux qui arrivent sur nos tables viennent autant de la pêche (espèces sauvages) que de l'élevage. Après, sachant que plus des deux tiers des stocks sont surexploités, avec un vrai risque d'extinction de certaines espèces particulièrement menacées (cabillaud, saumon, thon rouge,…), on pourrait penser que l'élevage est une meilleure option… sauf que ces derniers sont souvent alimentés par des farines animales issues… de la pêche d'autres espèces ! Si l'on ajoute à cela la dégradation d'écosystèmes pour les besoins de l'élevage, comme les mangroves d'Indonésie dévastées par la production de crevettes, pas sûr que l'environnement en sorte gagnant.

Enfin question goût, les animaux sauvages ont souvent un goût plus prononcé et une chair moins grasse que les animaux d'élevage… mais cela n'est ni meilleur ni moins bien, puisque cette appréciation reste une affaire… de goût !

Christophe Lavelle, chercheur au CNRS et au Muséum national d’Histoire naturelle

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