Plantes invasives en France, comment agir ?
Herbe de la pampa, arbre aux papillons, renouée du Japon... Ces plantes ornementales exotiques, parfois vendues en jardinerie, sont les « stars » de nos jardins. Mais ces espèces venues d’ailleurs représentent une réelle menace pour la biodiversité locale. On les qualifie alors d'« invasives ». Pourquoi sont-elles si problématiques ? Et surtout, comment agir à notre échelle pour limiter leur impact ?

Herbe de la pampa (Cortaderia selloana)
© Adobe Stock - L. BouvierL’Herbe de la Pampa a récemment fait l’actualité. Depuis quand et pourquoi cette plante est-elle désormais interdite en France métropolitaine ?
L’Herbe de la Pampa est appelée espèce exotique envahissante. Exotique car c’est une plante qui provient d’un autre continent (Amérique du Sud) et envahissante car lorsqu’elle est plantée quelque part, elle produit des multitudes de graines très mobiles qui lui permettent de se re-semer par milliers, y compris dans des milieux naturels, loin de là où elle a été plantée. Elle est alors capable de perturber l’équilibre des écosystèmes qui la reçoivent, d’appauvrir la biodiversité en remplaçant beaucoup d’autres espèces rares et fragiles, et d’affamer les animaux qui n’ont pas la capacité de s’en nourrir.
De ce fait, il est dangereux de propager sciemment cette plante. La législation veut décourager cette invasion biologique.
Les espèces invasives en 5 questions
Qu’est-ce qui fait qu’une espèce végétale est considérée comme invasive ?
Lorsqu’une plante sortie de son environnement d’origine a tendance à menacer les écosystèmes où elle s’implante, par une bonne adéquation entre ses exigences écologiques et les caractéristiques du territoire où elle arrive, par une capacité importante à se reproduire en grand nombre, et à envahir des écosystèmes fragiles, on la considère comme invasive.
Ce n’est évidemment pas l’espèce elle-même qui est à incriminer mais bien souvent la fragilité des écosystèmes qui la reçoivent et qui sont incapables de réguler leur prolifération. L’impossibilité de les éradiquer, même localement, lorsqu’elles poussent quelque part accroit encore cette perception d’invasion.
Pouvez citer d'autres espèces végétales envahissantes que l’on retrouve en métropole ?
Il y a une quarantaine de plantes réglementées au niveau européen et encore une quarantaine supplémentaire qui sont problématiques en France métropolitaine. Parmi les plus récalcitrantes et dangereuses, il y a celles qui posent de graves problèmes de santé publique : les ambroisies, très allergisantes, ou la Berce du Caucase qui provoque de graves “brulures” lors de contacts sur la peau.
Il y a aussi celles qui transforment les écosystèmes naturels c’est le cas du robinier faux-acacia qui modifie le cycle de l’azote et perturbe gravement la flore des sous-bois. De même, la Jussie envahit les plans d’eau au détriment de toutes les autres espèces qui les peuplent.
Dans les milieux urbains, de nombreuses invasives profitent de plantations volontaires ou du croisement de nombreuses voies de communication pour s’introduire dans les milieux déjà très perturbés par les activités humaines. Ainsi, elles s’installent durablement et étendent rapidement leur aire de distribution. Arbres à papillon (Buddleia), Séneçon du Cap, Renouée du Japon, Ailanthes sont parmi les plus connus.
Leur force est d’envahir des milieux vulnérables, fragilisés par une pression humaine particulièrement destructrice (artificialisation, pollution, ...). Leur présence est rarement néfaste pour l’écosystème urbain qui est déjà très dégradé dans les villes. En revanche, leur gestion peut être difficile pour les jardiniers car les méthodes de lutte sont souvent peu efficaces.
La liste des espèces végétales envahissantes en France
Retrouvez la liste des plantes invasives en France sur le site de l'Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN).

Inflorescence de Robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia)
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Fleurs de Renouée du Japon (Reynoutria japonica)
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Fleurs de Seneçon du Cap (Senecio inaequidens)
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Fleurs de Jussie (Ludwigia peploides)
© Adobe Stock - Scenic CornerQuelles menaces représentent les espèces végétales invasives pour la biodiversité ?
Une espèce invasive, par sa démographie galopante, est capable de couvrir de vastes zones géographiques. Ainsi, elle peut "faire de l’ombre" à de nombreuses autres espèces plus sporadiques et appauvrit les écosystèmes.
Souvent, les animaux herbivores ou phytophages (mammifères, insectes, ...) ne sont pas adaptés à leur consommation. Ils souffrent donc de perte de ressources alimentaires et désertent les surfaces concernées. Maillons par maillons, les écosystèmes se simplifient à tel point que leur fonctionnement est très menacé et les services rendus aux humains sont perdus. Sur la planète, les invasions biologiques constituent une menace de disparition pour beaucoup d’espèces rares.

Jardin à l'anglaise
© Basicmoments - stock.adobe.comComment agir face à ces espèces invasives tout en respectant la nature ?
Les mesures d’éradication étant très difficiles à mettre en œuvre, c’est en agissant au niveau de son propre jardin que chacun peut lutter contre les invasives. Il ne faut pas apporter de plantes d’autres pays car elles peuvent devenir invasives plus ou moins rapidement, même si dans leur pays d’origine, elles n’ont pas ce caractère envahissant qu’elles peuvent prendre sur notre territoire.
En connaissant bien la flore de nos régions et leur dangerosité potentielle, il est possible d’éviter leur culture et ainsi leur propagation. La participation à des programme d’initiation à la botanique permet de se familiariser avec ces notions et de favoriser les espèces locales les plus intéressantes pour l’ensemble de l’écosystème.
Les programmes de sciences participatives déclinées dans Vigie-Nature du Muséum national d’Histoire naturelle et surtout "Sauvages de ma Rue" apportent ces informations essentielles pour pouvoir favoriser la biodiversité de notre quartier d’habitation par exemple.

Sciences Participatives au Jardin - Sauvages de ma rue
© MNHN - M. EvannoComment fonctionne le programme "Sauvages de ma Rue" et comment y participer ?
Le programme se base sur la participation volontaire de particuliers, associations, écoles, collectivités... qui établissent la liste des espèces qui poussent dans les espaces publics des villes et l’envoient sur le site dédié. Ils peuvent s’aider du Guide Sauvages de ma rue, publié à cet effet, ainsi qu’à des applis d’aide à l’identification des plantes par le smartphone comme Pl@ntnet. Le site internet de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (MNHN/OFB) est une mine d’informations sur les espèces invasives.
Avec les données recueillies par les observateurs, les chercheurs comprennent mieux les facteurs qui favorisent une bonne qualité de biodiversité. La participation est donc essentielle pour enrichir les connaissances scientifiques et orienter les politiques de gestion urbaine. Elle permet également de sensibiliser le grand public à la richesse de la flore spontanée en ville, de renforcer le lien entre les citoyens et leur environnement, et de promouvoir des pratiques respectueuses de la biodiversité au quotidien.
Relecture scientifique

Nathalie Machon
Spécialiste en écologie urbaine, coordinatrice du programme de sciences participatives « Sauvages de ma rue » et Professeure du Muséum national d'Histoire naturelle
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