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Réchauffement climatique, disparition des espèces et pandémie nous alertent : Existe-t-il des limites que l’activité humaine ne devrait pas dépasser ? Ces limites peuvent-elles encore être repoussées par la technologie ? L’Histoire naturelle nous propose de reconsidérer nos visions des évolutions possibles.
Plaque funéraire, Grèce antique, (vers 520-510 av. J.-C.)
© R. Fund, 1954 / Courtesy of Metropolitan Museum of ArtAu sein des espèces, les limites sont structurantes et permettent la sélection naturelle et l’adaptation : chaque espèce fait plus de petits que son milieu ne peut en héberger, puis seuls certains individus pourvus de traits favorables à leur survie dans ce milieu spécifique parviennent à s’y reproduire.
Connaître et respecter les limites de notre corps et de notre environnement nous permet de vivre durablement sur notre planète. Chercher à les dépasser aide l’humain à se projeter. Mais cela ne doit pas pour autant mettre en danger l’ensemble des écosystèmes terrestres et des êtres qui les constituent.
Manifeste du Muséum. Face aux limites
Des limites difficiles à se représenter
Squelette de Dodo, Raphus cucullatus
© MNHN - B. FayeLes humains sont particulièrement enclins à repousser les limites naturelles. En partie parce que notre psychologie entrave notre compréhension des systèmes complexes et les échelles de temps long. Nous survalorisons le présent, oubliant le passé, dans un phénomène appelé « amnésie générationnelle ». Ainsi, rappellent les auteurs, « la biomasse des insectes ailés a diminué de 80 % en Europe entre 1976 et 2016 : qui se souvient des parebrises couverts de moucherons et de papillons ? »
Difficile également de se projeter et d’assimiler par exemple que tous les mammifères et oiseaux de plus de dix kilos pourraient disparaître à l’état sauvage d’ici 50 ans en zone inter-tropicale, à cause de la fragmentation des territoires naturels.
Toujours plus
L’activité humaine a crû sans se soucier de la capacité de la Terre à absorber les conséquences de notre expansion, encouragée par une organisation capitaliste dominante. « L‘économie s’est développée dans la négation des limites. »
Les progrès technologiques ont augmenté notre exploitation des ressources naturelles et humaines. Ils représentent pour certains l’espoir de dépasser encore les limites planétaires. Des humains rêvent même de repousser la mort. Mais cette « imposture transhumaniste » nie les connaissances de la biologie et des neurosciences.
Réinterprétation transhumanisme de l’homme de Vitruve © DR
© DRÀ l’opposé, certains jugent que nous avons déjà trop déstabilisé la planète et que notre disparition est proche. Or, l’Histoire naturelle démontre que les évolutions sont progressives : « Si nous devons faire face à un effondrement, il sera étalé dans le temps, et pas vécu avec la même brutalité par tous. »
Vue de Leeds, sur la route de Kirkstall (Royaume-Uni), début du XXe siècle
CC BY Wellcom collectionRelier l’écologie, l’économie et le social
Pour contenir les activités humaines dans les limites de la planète, il faudrait aboutir à une gouvernance globale capable de les réguler. Cela implique d’intégrer les questions cruciales d’inégalité entre pays, entre cultures et entre classes sociales, et de s’inspirer des bonnes pratiques de certaines populations autochtones. « Le futur ne peut s’envisager sans relier pleinement l’écologie, l’économie et le social. »
Les modes de consommation et de production évoluent. En partie grâce aux rapports des groupements scientifiques internationaux tels que le GIEC pour le climat ou l’IPBES pour la biodiversité qui ont provoqué des prises de conscience.
L’approche scientifique est indispensable pour obtenir et diffuser des données réalistes à même d’éclairer les décisions futures.
L’Histoire naturelle a ainsi un rôle essentiel à jouer pour redonner des limites constructives aux actions humaines.
Cell phones, Orlando (2004)
© C. JordanCoffret – Manifestes du Muséum