Le Muséum, berceau de la chimie

Le Muséum est l’un des lieux de naissance de la chimie. Dès sa création en 1635 sur ordre de Louis XIII, le Jardin royal présente en effet les plantes médicinales, leurs usages et la recherche des principes actifs. À cette époque, les termes chimiste et alchimiste désignent la même activité…

Portrait de William Davisson, dans Nouvelles archives du Muséum, série 3, volume 10, 1898, Pr 260

Portrait de William Davisson, dans Nouvelles archives du Muséum, série 3, volume 10, 1898, Pr 260

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C’est au Jardin qu’en 1647 un médecin alchimiste écossais, William Davisson, donne le premier cours de chimie public et gratuit jamais professé en France. À leur tour, ses successeurs font du site l’un des centres chimiques les plus vivants du XVIIIe siècle. Parmi les grandes figures de l’époque, Guillaume-François Rouelle. Dans son laboratoire sont formés les plus grands talents de la période pré-révolutionnaire : Bayen, Bucquet, Darcet, Macquer et Lavoisier.

Et l’auditoire est tout aussi brillant ! Encyclopédistes (Diderot), économistes (Turgot), magistrats (Malesherbes) et philosophes (Rousseau) s’y pressent. Le succès est tel qu’il faut pousser les murs. Si bien que Buffon, intendant du Jardin, confie à l’architecte Verniquet la tâche de construire un nouvel amphithéâtre.

Pierre Petit, [Vue intérieure de l'Amphithéâtre avec installation pour le cours de chimie], [sans date], photographie noir et blanc, 331x270 mm, IC 5145

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Belliard, Delpech, « Lavoisier », XIXe siècle, estampe, 355x600 mm, PO 797GF

Belliard, Delpech, « Lavoisier », XIXe siècle, estampe, 355x600 mm, PO 797GF

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Entretemps, la chimie trace sa propre route dans les années 1730, en abandonnant la recherche de la « pierre philosophale » pour se tourner vers la matière et ses composants dans une démarche scientifique fondée sur l’expérimentation et la logique. À partir de 1772 s’installe à bas bruit une révolution chimique dont le "père" est Lavoisier, et son fameux « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ». Chimiste de génie, il est aussi juriste et fermier général, ce qui le mène droit à la guillotine en 1794. La chimie moderne prend donc son essor sans lui… La Révolution française est à l’œuvre. Par décret de la Convention, le Jardin du Roy devient Muséum d'Histoire naturelle en 1793 et deux chaires de chimie sont créées. Antoine-François Fourcroy, chimiste et conventionnel, y enseigne la nouvelle « théorie » de Lavoisier dont il est un ardent propagandiste. Tandis que Vauquelin découvre le chrome, Chevreul isole, caractérise et nomme le cholestérol. L'industrie textile, et en tête les manufactures de toiles de coton imprimées (les « indiennes »), se tourne vers la chimie afin d'améliorer la technique d'impression des tissus et leur coloration.

Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme

Antoine Lavoisier, dans son Traité élémentaire de chimie en 1789

Maurin, Langlumé, « Nicolas Louis Vauquelin », XIXe siècle, estampe, 128x208 mm, PO 1189

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Julien, Blaizot, « A.F. Fourcroy», [sans date], estampe, 127x216mm, PO 450

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Anonyme, [Edmond Frémy], [avant 1894], photographie noir et blanc, 200x300 mm, PO 1671

Anonyme, [Edmond Frémy], [avant 1894], photographie noir et blanc, 200x300 mm, PO 1671

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Alors que le pays entre de plain-pied dans l’ère industrielle sous le Second Empire, une école de chimie ouvre au Muséum en 1864 sous l’impulsion du professeur Fremy. Une première en France qui ne compte pas encore de cursus d’ingénieurs ! Autre originalité : les cours sont gratuits et l’expérimentation y tient une place de choix. C’est d’ailleurs Fremy qui inaugure en 1872 les bâtiments sis au 63 rue de Buffon, où se trouve l’actuel laboratoire de Chimie.

De 1864 à 1892, date de la suppression de l’école, plus de 1 400 élèves y sont formés. Véritables artisans de l’industrie chimique et de la recherche universitaire, les plus connus sont Moissan, premier Français à avoir obtenu le prix Nobel de Chimie (1906), Arnaud, successeur de Chevreul et pionnier des recherches en chimie végétale, Étard, Bertrand, Verneuil, Becquerel et Curie.

Anonyme, [Chevreul], estampe, 60x80mm, PO 1611

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Anonyme, [Gabriel Bertrand], photographie noir et blanc, 185x275 mm, PO 3016

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Anonyme, « A. Verneuil 1856-1913 », [sans date], photogravure noir et blanc, 180x235 mm, PO 2232

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Aujourd’hui, la chimie au Muséum reste tournée vers les molécules d'origine naturelle, mais avec un axe écologique renforcé : plantes toxiques, intérêt pharmacologique en lien avec les aspects socio-culturels, rôle des médiateurs chimiques dans les interactions entre organismes vivants qui régissent le fonctionnement d'écosystèmes variés dans les environnements terrestres et marins… C’est l’âge d’or de la chimie verte. Elle tend à réduire l’usage des matières premières fossiles, de l’énergie et de sous-produits, la production de déchets et la toxicité… Pour davantage de matières premières renouvelables, de catalyseurs naturels plus performants et de recyclage.

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