Recherche et expertise
Communiqué de presse

Mécanismes de production des hautes fréquences chez les grillons et rôle des fréquences fantômes

Des chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle et du CNRS, associés à des collègues britanniques ont révélé la manière dont certains grillons ont évolué pour produire des chants d’appel dont les fréquences sont beaucoup plus hautes que celles des autres grillons. En utilisant les capacités sonores non exploitées de leurs ancêtres, les grillons en question ont vu leur chant doubler ou tripler leur valeur de fréquence, passant de 4-8 KHz à 14-26 KHz, soit des signaux à hautes fréquences, bien au-delà du seuil audible par l’oreille humaine (20 kHz).

Ces grillons appartiennent à la sous-famille des Eneopterinae, particulièrement diversifiée dans la région Pacifique et ont pu être étudiés notamment à Singapour et en Nouvelle-Calédonie entre 2009 et 2012 lors d’expéditions organisées par le Muséum national d’Histoire naturelle et l’ANR Bioneocal. Les chercheurs ont ainsi découvert que l’évolution des hautes fréquences était due à une modification de la densité des dents de leur appareil stridulatoire couplée à une exploitation de résonances déjà existantes dans le chant de leurs ancêtres sous forme de vibrations harmoniques.

En parallèle, l’étude du spectre sonore a révélé des fréquences dites fantômes à basses fréquences, ne jouant plus de rôle dans la communication actuelle de ces espèces, mais constituant un témoignage de l’évolution par à-coup des signaux de communication.

Le chant des grillons est en effet produit par un appareil spécialisé porté par les élytres, soit la première paire d’ailes rigidifiées. Cet appareil comprend notamment une nervure munie de petites dents sur sa face ventrale. Ces petites dents frottent l’autre élytre à la manière des dents d’un peigne sur lesquelles on passe le doigt. Le son produit possède alors une fréquence dépendant de l’espacement des dents et de la vitesse à laquelle elles sont frottées. Pour cette étude, l’équipe de recherche a mesuré à la fois les mouvements fins des élytres durant la stridulation à l’aide de vidéos à haute vitesse et de diodes ultrasensibles, mais aussi leurs propriétés vibratoires en utilisant des techniques de vibrométrie laser.

C’est ainsi qu’en combinant analyses fonctionnelles pointues et contexte phylogénétique, les scientifiques ont pu étudier l’évolution d’un groupe de grillons vers des chants d’appels dont les fréquences sont doublées ou triplées lors du processus mis en évidence.

Mâle de Nisitrus vittatus au Labrador Park de Singapour

© MNHN - T. Robillard

Référence

Robillard T.*, Montealegre-Z F.*, Desutter-Grandcolas, L. Grandcolas, P. & Robert, D. 2013 (*Joint first author). Mechanisms of high frequency song generation in brachypterous crickets and the role of ghost frequencies. Journal of Experimental Biology 216, 2001-2011.
 

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