Recherche et expertise
Communiqué de presse

La plus ancienne interaction entre insectes sociaux découverte dans un morceau d’ambre mexicain

Une équipe de chercheurs dirigée par André Nel (Muséum national d’Histoire naturelle/ CNRS/ UPMC/ EPHE), vient de publier dans PLOS ONE l’étude d’un morceau d’ambre exceptionnel du Mexique. En effet, celui-ci révèle pour la première fois, par une approche innovante permise par la tomographie X, des interactions entre insectes eusociaux datant de plus de 15 millions d’années.

Les inclusions biologiques dans l’ambre1, très souvent représentées par des insectes et autres arthropodes, fascinent depuis longtemps les hommes et apportent, lorsque les ambres sont translucides, des informations exceptionnelles sur la biodiversité passée de notre planète. Une équipe de l’Institut de Systématique Evolution Biodiversité (Muséum national d’Histoire naturelle/CNRS/UPMC/EPHE) vient de publier dans la revue PLOS One une étude consacrée à un morceau d’ambre exceptionnel du Mexique conservé dans les collections du MNHN. Celui-ci comporte plusieurs inclusions d’insectes (syninclusion) avec, pour la première fois, des interactions évidentes entre fourmis et termites datées du milieu du Miocène (15 M.a.).

En effet, on sait qu’à l’heure actuelle, principalement dans les zones intertropicales, les fourmis légionnaires sont particulièrement friandes d’autres insectes eusociaux (fourmis, termites) sur le nid desquelles elles accomplissent de véritables « raids ». Par ailleurs, différents genres de fourmis ont pour habitude de « s’installer » dans les nids de termite du genre Nasutitermes, et d’y cohabiter pacifiquement, pour des raisons encore mal comprises, mais qui sont sans aucun doute d’ordre mutualiste (chacun profite de la présence de l’autre) ou commensale (relation de non réciprocité mais qui n’est pas d’ordre parasitaire). Certaines observations suggèrent que fourmis et termites sont même capables de s’associer pour défendre le nid commun.

Dans le cas de ce morceau d’ambre du Mexique, les chercheurs ont découvert la présence de plusieurs fourmis du genre Azteca, plusieurs termites du genre Nasutitermes, et une fourmi du genre Neivamyrmex (fourmi légionnaire) saisie dans la résine avec un termite entre ses mandibules. Les chercheurs suggèrent donc que cette scène figée dans la résine est le vestige d’un raid de Neivamyrmex, sur une colonie d’Azteca et de Nasutitermes en interaction.

En observant ce morceau d’ambre sous tomographie à rayons X, cette équipe de chercheurs s’est rendu compte, pour la première fois, que les différentes coulées qui composent le morceau d’ambre, difficilement observables à l’œil nu, étaient visibles sur les coupes obtenues par CT scan2. En croisant cette information avec la densité respective de chaque spécimen, les chercheurs posent ici les bases d’une méthode qui permet de mieux reconstruire les processus taphonomiques3 et donc d’être plus précis dans l’interprétation des paléocomportements qui peuvent être étudiés via les inclusions dans l’ambre.

A : Vue d’ensemble du morceau d’ambre et ses inclusions / B : Reconstruction 3D du morceau d’ambre avec ses inclusions (fausses couleurs) – en bleu : termites du genre Nasutitermes ; en violet : fourmis du genre Azteca, en rouge : fourmi légionnaire Neivamyrmex

© D. Coty

Notes

1. L’ambre est constitué par de la résine végétale, secrétée par divers types d’arbres (Gymnospermes ou Angiospermes), puis qui se fossilise. Les ambres à inclusions sont datés du Trias (-230 M.a.) pour les plus anciens, à de nos jours. Les plus fréquemment rencontrés sont les ambres cénozoïque (Ere Tertiaire), de -64 à -1 M.a.

2. CT scan : Computer Tomography Scanning

3. Taphonomie : étude des processus qui interviennent après la mort d’un organisme, comprenant donc les processus de fossilisation et de formation des gisements fossiles.

 

Référence

David Coty, Cédric Aria, Romain Garrouste, Patricia Wils, Frédéric Legendre, André Nel. The first ant-termite syninclusion in amber with CT-scan analysis of taphonomy. PLOS ONE, 20 août 2014.

Contact presse

Muséum national d’Histoire naturelle
Flore GOLDHABER – 01 40 79 38 00
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