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Barcoding : méfiez-vous des grenouilles

Depuis les années 1970, les espèces françaises de grenouilles sont protégées car elles sont menacées d’extinction ; les cuisses de grenouilles consommées sont donc principalement des espèces tropicales. Il s’agit d’un commerce important puisque chaque année près de 5000 tonnes de grenouilles sont importées majoritairement d’Indonésie, ne provenant pas d’élevage mais prélevées directement dans la nature. 

En utilisant la méthode moléculaire du Barcoding - qui permet d’identifier les espèces à partir d’une courte séquence de leur ADN - des chercheurs de l’Institut de systématique, évolution et biodiversité (Muséum national d’Histoire naturelle/CNRS/EPHE/UPMC*) ont pu identifier les espèces contenues dans les sachets de cuisses de grenouilles surgelés achetés en magasins. Dans 99 % des cas, le consommateur ne mange pas l’espèce dont le nom est inscrit sur l’emballage. Pour les non-initiés, il est difficile de faire la distinction entre les différentes grenouilles mais pour les taxonomistes, il existe une réelle différence entre l’espèce annoncée sur l’étiquette la Rana macrodon, et l’espèce réellement vendue, Fejervarya cancrivora. Dans la classification, ces deux espèces de grenouilles sont aussi éloignées que la vache et le mouton.

Les protecteurs de la nature s’inquiètent pour l’avenir des espèces vendues dans le commerce. En effet, chaque année plus de cent millions d’individus sont tués dans la nature sans qu’aucune étude scientifique n’ait été menée sur les effets de cette collecte sur les populations de grenouilles et sur la biodiversité de l’Indonésie. Ces résultats soulignent la nécessité d'études à grande échelle pour évaluer l'état des populations sauvages afin de mieux les protéger.

référence

Ohler A. & Nicolas V. 2017. What frog’s leg do froggies eat? The use of DNA barcoding for identification of deep frozen frog legs (Dicroglossidae, Amphibia) commercialized in France. European Journal of Taxonomy 271: 1–19

Note

* Le Muséum national d’Histoire naturelle, le CNRS, l’UPMC sont membres de Sorbonne Universités.