Événement

Paris, berceau de la cristallographie

Le Cabinet d’Histoire du Jardin des Plantes présente, du 14 mai au 28 août 2014, une exposition regroupant une profusion de cristaux et de documents d’exception permettant de retracer la fondation de la cristallographie à Paris. Vous serez invité à découvrir différents cheminements qui ont eu lieu au cours des siècles, ou bien vous laisser séduire, dans un cadre raffiné, par de beaux cristaux chargés d’histoire, de signification et de culture.

Dans sa quête des richesses minérales, l’homme rencontre des pierres aux formes géométriques presque parfaites, ce qui leur valut jadis le nom de "pierres angulaires". Bien qu’elles paraissent être l’œuvre d’un habile artisan, il n’en est rien ! En effet, ces pierres ont toutes été trouvées, telles quelles, dans des cavités, des géodes et des fissures tapies au fond des mines et des parois des carrières.

Pendant des siècles elles ont intrigué les savants et les philosophes. Étaient-elles modelées par les milieux qui les entouraient ? Contenaient-elles des substances douées d’une "vertu formatrice" ? Ou bien ne devaient-elles leurs formes géométriques qu’à elles-mêmes ?

Parmi ces pierres, le cristal de roche se présente souvent en prismes hexagonaux surmontés d’une pyramide à six faces. Son nom vient du grec "crystallos" qui signifie glace : en effet on pensait que ce minéral était une eau ayant subi un froid si fort qu’elle se serait transformée en une glace infusible. Le cristal de roche est aussi une matière qui était utilisée pour la fabrication d’objets luxueux et de lustres. Au XVIe siècle, le verre "cristal" s’ajoute au cristal de roche lorsque l’incroyable défi de fabriquer un verre ayant la même limpidité que le cristal fut relevé à Murano en Italie.

La naissance de la cristallographie

C’est en 1723 que le suisse Moritz Cappeler (1685-1769) crée le mot cristallographie : les "pierres angulaires" deviennent alors des "cristaux". La cristallographie est une des disciplines ayant le plus bénéficié de l'apport des savants français et en particulier des parisiens.

À la fin du XVIIIe siècle, elle devient une science moderne à part entière grâce à l'énoncé des premières lois et des premières relations mathématiques découvertes par les minéralogistes français, Jean-Baptiste Romé de l’Isle (1736-1790), lié à l’École de Mines, et René-Just Haüy (1743-1822) qui œuvrait au Jardin des Plantes.

Rapidement, plusieurs écoles cristallographiques apparaissent. L'École allemande s'oriente pour de nombreuses décennies vers une vision géométrique de la cristallographie. L'École française s'engage avec Gabriel Delafosse (1796-1870) dans une autre voie, bien spécifique, qui lui permet d'aborder des champs d'études peu ou pas abordés ailleurs. Il en résulte les découvertes majeures sur la dissymétrie moléculaire (deux molécules ont des formes qui sont l’image miroir l’une de l’autre) par Louis Pasteur (1822-1895) et la théorie du réseau cristallin par Auguste Bravais (1811-1863).

Des découvertes théoriques qui ont rapidement trouvés des applications

Pendant des siècles, la seule méthode de purification des corps chimiques était la distillation. Avec la naissance de la cristallographie, une nouvelle technique voit le jour : la cristallisation fractionnée. Elle repose sur la différence de solubilité à chaud et à froid, dans un solvant donné (tel que l’eau), entre le composé à purifier et les autres. Le procédé consiste à mettre en solution le mélange à purifier dans le solvant chaud, puis de laisser refroidir, suivre l’apparition des cristaux des différentes substances et les isoler. Cette technique a notamment permis à Chevreul d’obtenir en 1814 du cholestérol pur à partir de calculs biliaires humains.

En 1817, Haüy publie son Traité des caractères physiques des pierres précieuses qui illustre l’importance de la science dans ce domaine. Grâce au collectionneur anglais Henry-Philip Hope (1774-1839), il bâtit la première collection scientifique de pierres précieuses de l’Histoire qui est aujourd’hui encore conservée au Muséum national d’Histoire naturelle et qui est présentée dans cette exposition.

La naissance de la cristallographie signe aussi le début de la chasse aux cristaux de synthèse. Ces recherches portait principalement sur les cristaux de valeur, c’est ainsi qu’en 1837, Gaudin (1804-1880) commence la quête du rubis. Ensuite il semble que presque tous les chimistes français s’y intéressent. En 1877, Edmond Frémy (1814-1894) obtient de petits rubis de qualité, et plus tard son élève Auguste Verneuil (1856-1913) met au point une méthode encore utilisé de nos jours. Henri Moissan (1852-1907) s’attaque, sans succès, à la production du diamant : "un problème pour le chimiste moderne, le pendant de la pierre philosophale pour les alchimistes".

Thèmes de l’exposition

Les cristaux dans la nature
Vous pourrez contempler un éventail de quelques-uns des plus beaux cristaux conservés au Muséum.

Les premières découvertes et l’école française de cristallographie
Les ouvrages, collections et instruments scientifiques des premiers grands cristallographes sont exposés ainsi que des modèles de cristaux rarissimes.

Les premières applications :
Les premières découvertes théoriques ont été suivies des premiers essais de synthèse de cristaux précieux : rubis, saphir, émeraude. D’exceptionnels représentants des premières réussites sont présentés, certains, pour la première fois depuis des décennies.

La cristallographie aujourd’hui à Paris :
L’héritage des travaux historiques présentés dans cette exposition est encore présent dans les lieux qui les ont accueillis. La recherche en cristallographie à Paris est encore l’une des plus actives au Monde. Les études s’orientent dans les connaissances de la Terre profonde, les couleurs dans les minéraux, les cristaux sous haute pression, les astéroïdes et planètes, les biominéralisations, l’environnement, le développement durable et beaucoup d’autres encore.

Du laboratoire à l’art
Roger Caillois et de nombreux autres artistes se sont inspirés de cristaux dans leurs œuvres. En visitant l’exposition vous pourrez admirer plusieurs exemples d’œuvres inspirés de ces cristaux.

Retrouvez les informations pratiques de cette exposition sur la page dédiée dans l'agenda.

Azurite avec Malachite verte autour. Chessy, Rhône (France)

© MNHN

Albite blanche sur muscovite. Mine Urucum Galiléia, minas gerais (Brésil)

© MNHN

Dendrites magnétite transformées en hématite. Volcan Payun, Mendoza (Argentine)

© MNHN

Filtre pour l’étude de la double réfraction (diamant, topaze, feldspath et grenat)

© MNHN

Azurite. Chessy, Rhône, France

© MNHN

Cristallographie

© MNHN - C. Ferraris

Spodumène quazite. Mine Pala Chief, Californie (État-Unis)

© MNHN

Creuset pour la synthèse de rubis, fin du XIXe siècle

© MNHN